Les Chevaliers d'Émeraude - Non Officiel et innactif
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 Un coeur dans la tourmente

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Maybel
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MessageSujet: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyVen 26 Mai - 16:51

Dans les archives du forum officiel, il y a un roman. Le mien. Non, ce n'est pas la fermeture temporaire qui me l'a enlevé. C'est un choix tout ce qu'il y a de plus personnel.

Mais voilà qu'à la demande de certaines, je me suis remise à l'écriture. Puis, j'ai choisi de le remettre, mais ici plutôt que là bas...

Je n'aime pas beaucoup les commentaires publics. Par contre, en privé, j'apprécie énormément.

J'ai dû retravailler les chapitres. Je sais que j'aborde des sujets assez brûlants. Coeurs sensibles, s'abstenir s'il vous plaît.

Je suis à la recherche de ma disquette. Ensuite, je posterai...


Dernière édition par le Sam 10 Juin - 15:49, édité 3 fois
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyVen 26 Mai - 17:17

À Charline, July et Marika
Pour toutes sortes de raisons



Introduction



Son sac sur l'épaule, la jeune Ariane referma la porte derrière elle. Elle ne reviendrait jamais dans cette maison. Lentement, elle défit la clée de son trousseau et la laissa tomber sur le sol. Une larme roula sur sa joue. Malgré que sa décision soit prise depuis longtemps, partir lui faisait mal.

Pour elle, quitter cette maison voulait dire fuir. Elle fuyait sa vie, qui lui semblait si irréelle. Une vie qui lui semblait qu'une autre vivait à sa place et dont elle n'était qu'une spectatrice silencieuse. Elle fuyait la cruauté de son père qu'elle ne supportait plus. Elle fuyait les cris dans la nuit.

Malgré la pluie qui faisait rage, l'adolescente n'avait pas voulu retarder son départ. Ses longs cheveux blonds lui collaient au visage et elle tremblait de froid. Elle marcha jusqu'au terminus où elle monta dans l'autobus.

Mentalement, Ariane faisait la liste de ce qu'elle avait pris avec elle. Elle n'avait rien oublié. Puis, elle fit la liste de ce qu'elle abandonnait. Son coeur se gonfla de chagrin lorqu'elle songea à sa jeune soeur. Comment aurait-elle pu expliquer son départ à Audrey sans lui briser le coeur encore plus?

L'autobus se mit en route et Ariane ferma les yeux. Le trajet devait durer plus de trois heures. Autant prendre du repos pendant qu'elle pouvait...

*****


À son réveil, Ariane se sentait perdue. Elle mit quelques minutes à se souvenir qu'elle était dans l'autobus. Il faisait humide et l'air sentait la moisissure. Tant pis. Au moins, elle s'éloignait de la maison de son enfance. Si elle en avait eu une.

Ariane observa les autres passagers. Fuyaient-ils quelque chose eux aussi? Avaient-ils un passé aussi douloureux que le sien. Sur le banc derrière elle, un jeune homme ronflait. Ses vêtements semblaient appartenir à une autre époque. Il dégageait une odeur forte. Sa langue claquait à chaque respiration.

Faute de mieux à faire, la jeune fille se mit à réfléchir. Dans sa tête, tout était brouillé. Comme si un violent orage avait tout balayé. Parfois, des souvenirs un peu plus clairs faisaient surface. Comme cette soirée où, il y a trois ans, tout avait commencé...

Un ami de son père avait besoin d'une femme pour l'accompagner à une réception. Robert, en échange de quelques billets, avait proposé sa fille. À treize ans, Ariane avait déjà des airs de jeune femme. Avec un peu de maquillage, son âge ne paraîtrait pas. Ariane avait dû collaborer. Une fois... Et puis encore... Peu à peu, la routine s'était instalée. Tous les samedis, Ariane accompagnait des amis de son père à divers endroits. Pour le paraître, qu'ils disaient. Si les hôtes de ces réceptions avaient su l'âge d'Ariane, le paraître en aurait pris un coup.

Chaque fois, c'était pareil. Monter gentiment dans la voiture et faire semblant d'être la nouvelle conquête du monsieur. Après quelques fois, c'était facile, mais la première, Ariane avait eu très peur de mal faire. L'homme qu'elle accompagnait avait plus de trois fois son âge. L'adolescente aurait préféré mourir que de monter dans la voiture. Son père l'avait poussé comme on pousse un chien dans une cage. Ce soir là, Ariane avait cessé de le voir comme un père et avait commencé à le voir en homme d'affaire. Il aimait tellement l'argent qu'il en faisait même avec sa fille aînée. Une seule règle:
Ne pas toucher.


Dernière édition par le Ven 9 Juin - 13:29, édité 1 fois
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyVen 26 Mai - 20:33

Chapitre un

Secouée par des tempêtes invisibles




L'autobus s'arrêta enfin. Ariane avait mal à la tête. Elle ne pensait qu'à une chose: Sortir rapidement de cet autobus aux odeurs nauséabondes.

L'endroit où la jeune fille venait de débarquer semblait désert. Ariane marcha. Elle savait où elle allait. Elle avait loué un petit studio. Elle y resterait aussi longtemps qu'il le faudrait. Elle avait même déniché un travail. Le vieux patron d'un petit café avait accepté de la prendre à l'essaie la semaine suivante.

Arrivée devant la porte de l'immeuble, Ariane eu un haut le coeur. Vivre dans un endroit aussi désolé après avoir connu le luxe d'une grande maison confortable lui donnait la chair de poule.

Ce n'est pas le bonheur qui m'attend ici. Ce n'est que l'absence de malheur, se dit elle.

Ariane poussa l'énorme porte de bois et monta j'usqu'au dernier étage par un escalier qui ne semblait pas pouvoir porter son poids. Elle se retrouva devant la porte de son logement. Elle l'avait pris entièrement meublé pour pouvoir partir avec le moins de choses possible. Elle ouvrit la porte. Des larmes roulèrent sur ses joues lorsqu'elle posa les yeux sur l'unique et minuscule pièce. Sans se donner la peine de l'ouvrir, elle se laissa tomber sur le divan lit.

*****


Ariane fut tirée du sommeil par quelqu'un qui frappait à sa porte. Bien qu'elle n'attandait personne, elle alla ouvrir. C'était un jeune homme qui tenait deux tasses de café. Peu méfiante de nature, Ariane le laissa entrer.

- Je m'appelle Alexis. Je t'ai entendu arriver cette nuit. Quand on déménage la nuit, j'imagine qu'on apporte pas sa cafetière avec soi. Un café noir, ça te va?

Ariane hésita un peu et accepta la tasse de café brûlant.

- J'arrive de loin. Je m'appelle Ariane. Merci pour le café. On ne prend effectivement pas sa cafetière avec soi lorsqu'on déménage en pleine nuit.

Alexis offra ses services de guide dans le quartier, de livreur de café noir le matin ou simplement, pour discuter du temps qu'il fait ou de la musique en vogue. Ariane apprécia tout de suite ce voisin à l'air un peu mystique et aux yeux de loup. Alexis parlait beaucoup. Ariane, elle, préfèrait l'écouter.

*****


Ariane revêtit son uniforme vert lime en se demandant pourquoi le vieil homme qui possédait le café avait choisi cette couleur si peu attirante. En se regardant dans la glace, la jeune fille eu une pensée pour sa soeur cadette, Audrey qui aurait adoré cet uniforme si voyant.

En arrivant au café, Ariane fit la connaissance de Brigitte, une femme à la mi-quarentaine qui ressemblait à une bonne grand-mère bien en chair. Sur Brigitte, l'uniforme vert lime semblait presque beau. Elle apprécia la patience de cette femme qui lui expliquait de façon assez humoristique le fontionnement de l'endroit. Ariane se sentit vite à l'aise et servit ses premier clients sans faire de bêtises.

La journée passa si rapidement que lorsque la fin de son chiffre de travail sonna, Ariane eu l'impression d'être là que depuis une heure.

Le temps s'écoule plus facilement lorsque la peur nous quitte, pensa Ariane

Elle salua Brigitte et retrouva Alexis qui l'attendait dehors.

- Le patron n'a pas été trop dûr?
- Je ne l'ai pas vu. Il passe son temps dans les cuisine.

Sans y penser, Ariane glissa sa main dans celle de son ami qui ne songa même pas à l'en retirer. Les deux jeunes gens marchairent jusqu'à leur domicile. C'est en arrivant devant la porte de son logement qu'Ariane eut conscience qu'elle tenait la main d'Alexis dans la sienne. Aussi rouge qu'embarrassée, elle retira rapidement sa main et entra dans son logement en refermant la porte, laissant Alexis perplexe dans le couloir.

*****


Seule dans son studio déprimant, Ariane se mit à réfléchir. Elle était terrorisée à l'idée de seulement paenser être amoureuse. Elle ne l'avait jamais été avant.

Ça ne peut pas m'arriver. Pas à moi. Et surtout pas si vite. Je ne suis pas de celles qu'on aime de toute façon. Il se rendra vite compte que je ne suis pas assez bien pour être aimée. Autant m'y faire dès maintenant, se dit Ariane en essuyant une larme qui roulait sur sa joue.

Le coeur en lambeaux et la tête trop pleine de mauvais souvenirs, Ariane se laissa tomber sur son divant-lit et versa des larmes qui, selon elle, ne valaient pas la peine qu'on les sèche.

*****


Alexis qui était resté dans le couloir frappa doucement à la porte. Il ne comprenait pas ce qui venait de se produire. Le jeune homme que plus rien n'impressionnait était déterminé à comprendre sa nouvelle amie. Même si pour cela, il devait passer des mois à attendre que celle-ci lui ouvre enfin son coeur. Ariane ne répondit pas. Puisque le logement ne possédait aucune autre issue et qu'il n'avait pas entendu le verrou, il tourna la poignée et entra.

Assis sur la seule chaise disponible, il regarda Ariane qui ne semblait pas l'avoir entendu entrer. Patient, il ne parla pas, ne bougea pas, attendant que son amie lève les yeux sur lui. Il connaissait Ariane depuis une semaine, mais savait déjà qu'elle portait en elle un lourd secret. Il voulait l'entendre.

Comme quelqu'un qui se réveille, Ariane leva finalement les yeux, mais préféra cacher son visage sur ses genoux relevés sous son menton que de dire quoi que ce soit. Les tempêtes dans son coeur n'appartenaient qu'à elle et elle craignait qu'en faire part à Alexis le fasse fuir encore plus que son air absent. Ariane ne connaissait pas encore très bien son voisin et ignorait que rien de ce qu'elle pourrait dire ne le ferait fuir.

Ce n'est qu'après qu'Ariane aie épuisé sa réserve de larmes qu'Alexis s'approcha d'elle. Ariane n'avait que seize ans, mais parfois, lorsqu'il la regardait, il avait l'impression qu'elle en avait beaucoup plus. Comme si elle avait trop vécu. Cette fille avait grandit trop vite. Il pouvait le voir dans ses yeux.

- Dis quelque chose.

Ariane voulut répondre, mais les mots refusèrent de sortir. Dans sa poitrine, une force invisible l'empêchait de se libérer du poids qu'elle portait depuis si longtemps. Même à des kilomètres de la maison de son père, la peur la tenait prisonnière de son passé. La distance ne changeait rien à ce qui avait déjà eu lieu. Est-ce qu'un jour, quelque chose changerait?

- Je ne peux rien dire, lui dit la jeune fille encore secouée par ses sanglots.
- Un jour tu pourras.

Alexis offrit sa main à Ariane pour l'aider à se lever, mais la jeune fille n'y accrocha pas la sienne. Elle se leva d'un bond. Comme si rien ne venait d'arriver et sortit de son appartement, Alexis derrière elle.

*****


Dehors, la nuit tombait doucement. Ariane sentit le poids de ses souvenirs s'estomper. Elle avait toujours aimé être dehors à la noirceur. Elle trouvait dans la noirceur et la fraîcheur de la nuit, un refuge pour son coeur douloureux.

Alexis ne savait plus comment réagir. Une minute, Ariane était anéantie et la suivante, elle courrait comme une enfant dans la nuit.

Quelle étrange fille. Je n'y comprend rien et elle m'attire comme un aimant, se dit-il à lui même.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyVen 26 Mai - 20:51

Charitre deux

La peur dans la nuit



Il était plus de trois heures. Ses longs cheveux encore remontés en chignon, Ariane passa la porte. Son père l'attendait dans la cuisine. Souhaitant à tout prix l'éviter, la jeune fille se dirigea vers l'escalier. Mais avant qu'elle ne l'aie atteint, son père l'appella.

Losqu'elle rentrait à cette heure tardive de la nuit, Ariane ne désirait qu'une chose: Dormir. Or, son père voulait un compte rendu détaillé de la soirée. Chaque geste, chaque mot devait lui être rapporté. Bien sûr, l'homme s'imaginait encore que sa règle, sacrée selon lui, était toujours respectée. S'il savait... Mais Ariane avait préféré ne pas envenimer sa situation déjà fort désagréable à vivre en racontant à son père la totalité de ses soirées. Et puis, on lui avait souvent dit de ne rien dire. Il ne la croirait pas. Il téléphonerait à son ami qui lui donnerait une version bien différente de celle de l'adolescente. Ariane inventa donc, pour son père, le récit d'une petite soirée tranquille.

Avant de l'envoyer dormir, l'homme rapella à sa fille de ne rien dire à sa mère. Elle en mourrait. Il lui dit également de ne pas parler à sa jeune soeur, car, beaucoup moins belle qu'elle, Audrey n'avait pas le même avenir.

En montant se coucher, Ariane souhaita de tout son coeur qu'une poussée d'acnée incontrôlable lui ravage le visage à jamais. Sachant bien que celà n'arriverait pas, elle enfila son pyjama et se glissa sous les couvertures. Elle se serait damnée pour une douche bouillante, mais le bruit aurait réveillé sa mère et sa soeur.


Ariane se révella en hurlant, haletante et bouillante de rage. Elle avait rêvé, mais cela lui avait semblé si réel. Elle s'était cru revenue chez son père. Elle regarda autour d'elle et ne vit que les quatre murs de son minuscule studio. Son coeur battait à tout rompre. Elle avait la bouche sèche et la tête prise entre le passé et le présent sans pouvoir y changer quoi que ce soit. Le passé était trop fort pour elle.

Ariane se leva pour ouvrir la porte à Alexis. Alerté par le cri de son amie, il était venu s'assurer qu'elle ne s'était pas blessée. Elle le laissa entrer.

Incapable de prononcer un seul mot, Ariane, d'un geste de la main, invita Alexis à s'assoir près d'elle. Le jeune homme ne se fit pas prier. Il appréciait d'être près d'elle. Même si, trop souvent, Ariane n'arrivait pas à lui parler.

*****



Au matin, Ariane se réveilla dans les bras d'Alexis. Elle secoua la tête pour raviver ses souvenirs. Mauvais rêve, Alexis. Elle n'avait pas su le chasser avant de replonger dans le sommeil. Elle ne voulait pas bouger. Elle craignait de réveiller Alexis et de devoir quitter ses bras. Bien qu'elle était incapable de lui avouer, elle se sentait en sécurité contre lui. Elle referma les yeux, mais ne trouva pas le sommeil.

Ariane réfléchissait. Pourquoi rêvait-elle à sa vie d'avant alors qu'elle souhaitait plus que tout l'oublier et passer à autre chose? Avec les nuits d'horreur qu'elle passait, au café, elle n'était que l'ombre d'elle-même. Elle avait peur que son patron lui trouve une remplaçante plus dynamique. Elle, elle servait les clients comme une automate. Pourtant, elle savait que sans ce travail, elle devrait se résoudre à retourner dans la maison de son père. Et ce qui l'attendait la terrorisait. Elle devait retomber sur ses pieds. Sans quoi sa vie serait plus infernale que jamais.

Derrière elle, Alexis bougea. Ariane cessa de respirer. Elle ne voulait pas qu'il se réveille. Elle avait encore besoin de réfléchir. Et c'était plus facile s'il la tenait dans ses bras. S'il se réveillait, sans doute la tiendrait-il encore, mais il voudrait qu'elle réfléchisse à voix haute. Alexis voulait comprendre l'incompréhensible.

Ariane pensa à sa jeune soeur. Comment entrer en contact avec Audrey sans que son père le sache? Une lettre? C'était bien trop risqué. Le courrier étant soigneusement inspecté, Audrey ne recevrait jamais sa lettre. Pas question non plus d'utiliser le téléphone. Audrey n'était jamais seule à la maison.

Malgré les prières silencieuses d'Ariane, Alexis se réveilla. Lui aussi eut besoin de quelques secondes pour remettre ses souvenirs en place. Trop heureux de tenir sa charmante voisine dans ses bras, il ne bougea pas. Mais il avait été démasqué. Ariane savait qu'il ne dormait plus. Il espérait qu'elle lui parle ou encore qu'elle reste là en silence, contre sa poitine. Il resserra son étreinte. Ce geste, bien malgré lui, mit fin au contact. Ariane se leva d'un bond et disparut dans la salle de bain.

Sous la douche, Ariane essaya en vain de cesser de penser en se laissant fouetter par une eau brûlante.

Il y a des gens qui tombent amoureux à soixante ans et qui osent y croire. Moi, je n'ai que seize ans et je ne crois plus en rien. Quelque chose en moi s'est brisé et la pièce manquante n'est plus fabriquée, se dit Ariane en fermant le robinet.

En sortant de la salle de bain, elle retrouva Alexis, les cheveux mouillés et deux tasses de café noir à la main. Avait-elle passé tant de temps sous la douche sans s'en rendre compte? Elle s'empara d'une des tasses de café. Du bout des doigts, Alexis effleura sa main.

- Garder le silence ne t'aidera pas, tu sais.
- Non, je ne sais pas. Je ne suis sûre de rien.
- Le silence est une prison, Ariane, pas un refuge
- Mais il ne fait de mal qu'à moi.

Alexis emprisonna doucement la main d'Ariane dans la sienne.

- Non, plus maintenant, Ariane. Ton silence m'écorche plus que n'importe quelle vérité.

Des larmes se mirent à couler sur les joues d'Ariane. Alexis ne tenta pas de l'apaiser. Lorsqu'il n'y aurait plus de larmes, peut-être il y aurait des mots. Il lui retira sa tasse de café des mains et la fit assoir. Accroupi devant elle, il attendit que l'orage passe. Et l'orage dura longtemps.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyVen 26 Mai - 21:09

Chapitre trois

Premiers aveux



Restée au café après son chiffre de travail, Ariane s'était retiré à une petite table à l'abri des regards. Elle écrivait. Incapable de parler à Alexis de ses souvenirs, elle avait décidé d'écrire. Elle ne cherchait pas ses mots pour raconter, elle les crachait sur le papier pour s'en libérer. Elle n'avait jamais vraiment écrit avant. Elle espérait que ça la soulagerait un peu. Le récit complet ne serait pas en ordre, mais on ne choisit pas dans quel ordre nos souvenirs reviennent nous torturer.

Il faisait noir depuis longtemps lorsqu'Ariane rangea son crayon et les feuilles qu'elle venait de noircir. Ariane quitta le café sans même prendre le temps de saluer Brigitte. Pour éviter que les souvenirs ne viennent la déchirer, elle courra aussi vite que possible. Elle ne s'arrêta qu'une fois devant la porte du studio d'Alexis.

Souhaitant presque qu'il ne réponde pas, elle frappa à la porte. Sans un mot, elle lui tendit les quelques feuilles et rentra chez-elle. Elle se fit couler un bain brûlant et s'y glissa. Les efforts qu'elle devait faire pour tolérer la température excessive de l'eau l'empêchaient de penser. Ce n'est qu'en entendant la porte s'ouvrir qu'elle eu conscience de ne pas l'avoir barrée. Elle espéra qu'Alexis aie la décence d'attendre plutôt que de pousser la porte de la salle de bain.

En sortant, Ariane trouva son voisin assis sur le divan-lit. Il tenait ses écrits dans ses mains. Elle eu dabord un geste pour retourner se cacher, puis se ravisa. Elle s'approcha d'Alexis. Ce dernier voulu lui rendre ses feuilles, mais d'un geste, elle refusa.

- Je les garde pour le moment, mais si tu veux, tu pourra venir les reprendre, lui dit-il en rangeant les feuilles dans la poche arrière de son jeans.

Ayant compris très rapidement que sa jeune amie était beaucoup plus sensible aux gestes qu'aux paroles, Alexis écarta un bras pour l'inviter près se lui. S'attendant davantage à être ignoré ou repoussé, il fut surpris de voir Ariane venir se glisser sous son bras. Avant qu'il puisse dire un mot, elle dormait. Il observa son visage que même le sommeil n'arrivait pas à rendre paisible.

Qui est-elle vraiment, cette tempête silencieuse? se demanda Alexis.

*****



À son réveil, Ariane était seule. Chercher Alexis des yeux lui aurait été inutile étant donné la petitesse du logement. Elle allait se lever pour aller se chercher un café au dépanneur du coin lorsqu'Alexis entra. Comme presque tous les matins, il tenait deux tasses de café noir brûlant. Ariane n'avait jamais osé lui dire qu'avant de le rencontrer, elle y mettait du sucre et du lait.

- C'est plus facile pour moi si je ne suis pas là à ton réveil, lui dit son voisin en lui tendant une tasse.
- Je comprend.

Pour dissiper son malaise et se donner une contenence, Ariane avala une longue gorgée de café. Elle savait qu'Alexis donnerait gros pour l'entendre prononcer plus de deux phrases, mais elle resta muette. Elle se fit une place sur le divan-lit et Alexis fit de même. Ariane se perdit dans ses pensées.

Ce soir-là, elle était rentrée tôt. Comme à l'habitude, Ariane essaya de se sauver de son père. Cette fois, il ne l'appella pas. Elle monta à sa chambre. Elle ferma la porte et verrouilla à l'aide d'un crochet qu'elle avait installé la veille.

Elle se regarda dans la glace. Elle ne vit aucune différence. Elle ne s'attendait pas à en voir. Elle savait qu'elle n'en verrait pas. Pourtant, il avait fallu qu'elle regarde. Ce soir, la seule règle qu'avait fixé son père, qui la marchandait comme un objet, n'avait pas été respectée. Ariane savait que son père serait furieux s'il venait à l'apprendre, mais ignorant totalement s'il le serait contre elle ou contre son ami, elle choisit de ne rien dire. Peu importait, car de toute façon, elle savait qu'elle devrait en payer le prix si elle parlait.

Malgré la peur de réveiller sa soeur et sa mère, Ariane se fit couler un bain chaud et y plongea. La chaleur calma la douleur dans son corps, mais son âme restait écorchée vive. Quelque chose en elle s'était brisé. Un morceau d'elle venait de lui être volé et jamais rien ne pourrait réparer le mal qui avait été fait.


*****


Voyant que des larmes roulaient encore sur les joues de son amie, Alexis lui prit la main comme il avait si souvent tenté de le faire. Cette fois, Ariane ne lui retira pas. Elle se rapprocha de lui pour aller appuyer sa tête sur son épaule.

- Ça fait mal quand ça revient, Alexis.

Muet, il attendait la suite, mais Ariane ne parla plus. Elle était calme et ne pleurait pas. Il aurait bien voulu savoir quel malheureux souvenirs venaient de lui rendre visite, mais il n'insista pas. Le temps viendrait où elle lui en ferait part.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 27 Mai - 1:56

Chapitre quatre

Un peu moins de silence




Alexis avait été tellement boulversé par le troisième récit des souvenirs d'Ariane, qu'il n'osait même plus lui prendre la main. Une peur atroce de lui faire du mal s'instalait en lui. Il comprenait mieux son silence, mais aurait voulu qu'elle crie. Comment un homme pouvait-il être si cruel envers sa chair et son sang? Comment un père pouvait-il se servir de sa fille comme d'un objet? Alexis savait vivre dans un monde de fous, mais certaines choses le dépassaient.

Alexis avait rencontré Ariane depuis un mois et elle était toujours aussi peu bavarde. Peu importe le sujet, souvent, la jeune fille restait muette. Il comprenait qu'elle garde le silence sur son passé, mais elle ne disait même pas quelques mots sur le temps qu'il faisait. Un soir qu'il était allé la chercher au café, Brigitte lui avait dit trouver Ariane plutôt bizarre. Elle servait gentiment les clients, mais ne leur parlait pas. Mis à part les quelques mots qu'elle se devait de prononcer pour être polie, Ariane était une serveuse silencieuse.

Les aveux de Brigitte avaient un peu rassuré Alexis. Il savait maintenant que le silence de sa voisine ne lui était pas réservé. Cela semblait plus être une habitude. Elle ne parlait pas. Ni à lui, ni aux autres. Plus il lisait ses récits, moins il arrivait à croire qu'elle était seulement peu bavarde de nature.

*****


À son réveil, Ariane sentit Alexis derrière elle. La veille, elle s'était encore endormie dans ses bras. Elle s'inquiètait d'en faire une habitude. Elle ne bougea pas. Elle attendait qu'Alexis se réveille. Elle ne travaillait pas et n'avait rien de prévu. Rester collée à Alexis lui faisait du bien, mais elle ne pouvait pas lui avouer. Elle profitait du contact pendant qu'il dormait et se sauvait sous la douche lorsqu'il se réveillait.

Doucement, Ariane se retourna pour faire face à Alexis. Elle observa avec attention son visage paisible. Il semblait si calme. Elle, même endormie elle angoissait. Alors qu'Alexis dormait, confiant et détendu, elle, gardait la machoire serrée et ses muscles restaient tendus.

En ouvrant les yeux, la première chose qu'Alexis vit fut le visage d'Ariane baigné de larmes comme à presque tous les matins. Lorsqu'Ariane eut un geste pour se lever, il l'en empêcha. Il n'eut pas à lui opposer une grande résistance. La jeune fille était d'une docilité inquiétante.

- Tu ne dis rien, c'est correct, mais ce matin, tu écoutes. Je sais d'où vient ton silence, mais je ne suis pas ta soeur et tu n'as pas à me protèger. Je ne suis pas non plus ta mère et je ne risque pas de préférer la version édulchorée de mon imbécile de mari.

Ariane écoutait son ami en essayant de trouver un point d'ancrage dans son regard. Alexis avait raison. D'un geste furieux, elle se grattait la main, mais avant qu'elle se blesse, Alexis l'arrêta.

- Pendant trois ans, on t'a demandé d'être belle et de te taire. Ce que j'ai lu, et je sais que ce n'est pas tout, est horrible, Ariane, mais terminé. Plus personne ne te demande de jouer la poupée bien élevée pour ensuite passer ses plus bas désirs.

Ariane tremblait. Son ami l'avait secoué et il le savait. Il s'en voulait, mais il avait autre chose à lui dire.

- Quand je me suis présenté ici la première fois, je croyais faire connaissance avec une voisine avec qui je passerais des soirées à parler de tout et de rien. Je me suis trompé. J'ai une voisine qui ne dit rien, mais je ne regrette pas. Je ne regrette pas d'être arrivé ici avec deux tasses de café parce que je suis tombé amoureux. Je suis amoureux, mais d'une petite furie sans parole. Je ne demande qu'à savoir qui tu es vraiment, ce que tu aimes. Je ne veux pas te blesser. Je suis incapable de seulement y penser.

Alexis se leva. Il regarda Ariane qui tremblait encore.

- Je vais faire du café, lui dit-il avant de quitter.

*****


Laissée seule, Ariane se calma. Alexis avait raison. Elle était pleine de mots qui se bousculent sans sons pour les exprimer. Même lorsqu'elle voulait lui parler, les mots restaient coincés et la peur la réduisait au silence. Pour mieux réfléchir, elle alla sous la douche.

Durant quelques secondes, en se laissant fouetter par l'eau, Ariane souhaita se noyer. Elle ne voulait plus avoir à expliquer quoi que ce soit. Ne plus se torturer à essayer de se refaire une vie.

*****


Chez lui, Alexis tentait de contenir sa rage. S'il avait eu devant lui, le père d'Ariane, il lui aurait arraché les yeux. Sur sa table, dans un cartable, il gardait les récits d'Ariane. Lorsqu'elle lui demanderait, il les lui rendrait.

Je suis le secrétaire particulier de mademoiselle Ariane. Je fais le café, je garde les archives et parfois, j'ai quelques bénéfices, pensa Alexis, un peu amer.

Il retourna chez sa voisine, café à la main. En entrant, il vit Ariane sur le divan lit, les yeux rivés sur lui. Avant de s'assoir près d'elle, il déposa les tasses de café sur la petite table. Ariane se retourna vers lui.

- Maintenant, c'est toi qui écoute.

Surpris, Alexis n'osa rien dire. Il tendit à Ariane sa tasse de café et garda le silence. Il attendit respectueusement qu'elle dise quelque chose.

- Tu as raison, le silence est une prison, ma prison. J'ai été forcée de garder le silence durant trois ans. Trois ans durant lesquelles j'ai dû faire semblant de n'avoir rien à dire. Je n'avais pas d'opinion et aucun goût particuler. Je prenais ce qu'on m'offrait ou me forçait à prendre. Je déteste le café noir. Ça manque de sucre et le lait.

Ariane déposa sa tasse pour prendre la main d'Alexis dans les siennes.

- Les hommes que j'ai rencontré, ils avaient l'âge de mon père. Ils étaient souvent agressifs, sentaient l'alcool et se rappelleraient de la taille de mon soutien-gorge, mais pas de la couleur de mes yeux.

Ariane s'accorda un moment pour reprendre son souffle. Elle n'avait pas souvenirs de s'être déja exprimé si librement. Elle regarda autour d'elle, puis s'accrocha au regard d'Alexis pour continuer.

- Je n'ai pas l'habitude de temps de douceur. Jamais on ne m'a accordé tant d'attention. Ça me fait peur. J'ai l'habitude qu'on m'utilise et qu'on me jette après. Je n'ai pas l'habitude qu'on me respecte et encore moins qu'on m'aime. C'est nouveau pour moi. Je ne connais rien à l'amour. Je ne suis même pas certaine de savoir ce que c'est.

Du bout des doigts, Alexis carressa la joue d'Ariane. Il se leva, prit la tasse de café d'Ariane et sortit. Une minute plus tard, il était de retour avec un café au goût de la jeune fille.

- Tu sais, tu aurait dû le dire bien avant aujourd'hui, lui dit-il en déposant la tasse devant elle.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 27 Mai - 21:16

Chapitre cinq

Rencontres difficiles



Six mois plus tard...

Ariane défaisait les dernières boites. Plutôt que de vivre toujours entre deux studios, elle et Alexis avaient pris la décision de déménager ensemble dans un logement un peu plus grand. Pendant plus de quatre mois, Alexis n'avait visité son studio que pour y faire du café et y prendre des vêtements. C'est Ariane qui avait proposé le déménagement. La jeune femme trouvait un peu absurde d'habiter deux logements quand un seul était suffisant.

À force de douceur, Alexis avait convaincu sa copine de voir un psychologue. Au début, Ariane s'était montrée réticente. Puis, lentement, elle avait accepté l'idée. Chaques semaines, elle se rendait à la clinique et racontait des bouts de sa vie. Par contre, Ariane avait refusé d'avoir un homme pour thérapeute. Elle faisait confiance à Alexis, mais il ne fallait pas lui demander plus pour le moment.

*****


Dans le bureau du Docteur Cynthia Desrochers, Ariane était assise au bord de la fenêtre. Elle ne savait pas quoi dire. Elle répondait aux questions, mais n'allait pas plus loin. Alexis l'avait accompagnée au premier rendez-vous, mais il l'avait vite laissée seule avec la psychologue.

- Parle-moi de ta mère, Ariane.

Ariane se retourna.

- Ma mère... Elle reste à la maison. Elle attend mon père. Elle ne prend aucune désision. Elle fait le ménage, les repas... C'est une parfaite ménagère, mais elle ne sait même pas ce qui se passe dans la maison qu'elle passe sa vie à nettoyer. Elle n'a aucune activité en dehors de la maison. Elle n'a même pas l'air de savoir que le monde est plus vaste que sa cour arrière. Et encore, la cour arrière, c'était pour ma soeur et moi, Elle ne fait même pas de jardin. Elle ne semble pas avoir de désirs autres que ceux de mon père.
- Tu crois que tu lui manques?
- Je n'y ai jamais pensé. Il y a sept mois, quand je suis partie, je fuyais. Je ne voulais pas y penser. Je lui en veux d'être si aveugle alors je n'ai pas songé une minute à ce qu'elle pouvait ressentir. Elle fait partie de ce que j'ai voulu laisser derrière moi.

Le Docteur Desrochers laissa Ariane reprendre son souffle. Elle connaissait de mieux en mieux la jeune fille et savait que tant de mots lui coûtaient encore beaucoup d'énergie.

- Tu voudrais la revoir?
- Je ne sais pas. Je ne suis même plus certaine de vouloir revoir ma soeur. Je commence à peine à mieux dormir. Je me réveille moins souvent. Il m'a fallu des mois pour y arriver. Revoir ma mère, ma soeur ou même mes amies, j'airais peur de retrouver trop de mauvais souvenirs.

Ariane s'arrêta de parler et regarda dehors. Elle ne dirait plus rien. La psychologue le savait. Lorsque sa jeune patiente se taisait subitement, l'entretien était terminé. Insister ne servait à rien.

- Tu peux y aller. On se revoit à la même heure lundi prochain.

Ariane prit sa veste et quitta le bureau. Alexis l'attendait dans la salle d'attente.

- Je croyais t'attendre encore un quart d'heure.

Silencieuse, Ariane lui prit la main et l'entraina dehors. Alexis commençait à douter de l'effet bénéfique de ces rencontres. Presque chaque fois, il retrouvait sa copine aussi silencieuse et perdue que lorsqu'il l'avait rencontrée.

*****


Ariane détestait les lundis. Ses rendez-vous avec le Docteur Desrochers, elle aurait voulu les éviter. Elle y allait parce qu'Alexis y tenait. Assise sur le fauteuil devant la psychologue, Ariane, comme à son habitude, attendait les questions. Elle aurait bien voulu quitter le bureau, mais Alexis l'attendait dans la salle d'attente et la renverrait gentiment.

- Si on parlait de ton copain, Ariane.
- Il est parfait. Je n'ai rien à dire.
- J'en doute beaucoup. Tu as dix-sept ans. Tu vis avec un jeune homme et tu n'as rien à dire?

Ariane se leva et alla s'assoir au bord de la fenêtre.

- J'attend Ariane. Tu as une vie de couple normale depuis six mois?
- Non, pas normale. Mais c'est correct.
- Il manque quelque chose?

Ariane remonta ses genoux sous son menton et fixa le vide. Elle ne voulait pas répondre. Mais elle sentait le regard du Docteur Desrochers. Elle savait qu'elle ne sortirait pas sans avoir répondu. Pour être certaine de ne pas manquer de temps, Ariane héritait toujours du dernier rendez-vous de la journée.

- Tu sais que je suis patiente, Ariane.
- Il ne me touche pas, répondit Ariane en fixant ses pieds.
- Et tu sais pourquoi?

Ariane retourna s'assoir sur le fauteuil. Elle fixa la psychologue droit dans les yeux.

- Il sait que des hommes qui avaient l'âge de mon père et même plus m'ont passé sur le corps. C'est bien assez pour dégoûter quelqu'un.
- Donc, tu ne lui en a jamais parlé. Je me trompe?
- Non.
- Es-tu certaine que c'est lui le problème? C'est peut-être toi qui es dégoûtée.

Ariane se gratta frénétiquement la main. C'est un geste qu'elle avait souvent lorsqu'elle était nerveuse ou mal à l'aise.

- Continue de te gratter, Ariane. Je n'irai pas t'arrêter.

La jeune fille cessa et leva les yeux. Elle en avait assez pour cette fois et souhaitait rentrer chez-elle.

- Cette semaine, je veux que tu essaie de parler à ton copain. Tu n'es pas repoussante, Ariane. On en reparlera lundi prochain. Tu peux partir.

Ariane ne se fit pas prier. Elle attrapa sa veste et quitta la pièce. Elle détestait de plus en plus ces rendez-vous avec la psychologue. Elle attrapa la main d'Alexis et l'entraina dehors. À peine sortie, elle éclata en sanglots. Alexis l'entoura de ses bras, mais elle se défit furieusement de son étreinte. Comme elle ne semblait plus vouloir avancer, il arrêta un taxi et la poussa doucement à l'intérieur avant d'y monter aussi.

De mieux en mieux. Dans quel état je vais la ramener dans un mois? se demanda Alexis pendant que le taxi s'arrêtait devant chez-eux.

*****


Pour le couple, le mardi était une journée de congé. Ce qui n'était pas si mal puisqu'Ariane était souvent un peu amortie par sa rencontre avec la psychologue. Ariane se réveilla tôt. Elle se leva et alla sous la douche. Pour elle, cet endroit était propice à la réflexion. En sortant, elle vit qu'Alexis était réveillé.

Il arrivait assez régulièrement que la psychologue lui demande de faire quelque chose et y revienne la semaine suivante. Chaque fois, Ariane s'en était bien sortie. Mais cete fois, elle n'avait pas envie de le faire.

Un peu à contre-coeur, Ariane alla retrouver Alexis. Assise sur le lit, elle fixait la porte.

- C'est ta rencontre d'hier qui te met dans cet état? lui demanda Alexis. Tu veux en parler?
- C'est plutôt que j'ai pas le choix. C'est de toi qu'elle m'a demandé de parler.

Alexis s'assit derrière Ariane et l'attira contre lui.

- Qu'est-ce que j'ai, moi?
- Toi, rien. C'est plutôt de nous qu'il s'agit. Elle m'a demandé si j'avais une vie de couple normale.

Alexis se leva. Ariane essaya de le retenir.

- Je te vois venir, Ariane. Si tu veux qu'on en parle, on va le faire, mais j'ai besoin d'un café.

Ariane attendait. Elle alla s'assoir dans le salon. Elle aimait profiter de toutes les pièces de ce nouvau logement. Elle en avait assez de tout faire dans la même pièce. Alexis alla s'assoir près d'elle avec deux cafés. Ariane se retourna vers son copain et prit sa tasse.

- Je ne veux pas juste que tu me fasse un café et que tu me regardes dans les yeux pour voir si je ne vais pas me mettre à pleurer, Alexis. Oui, surement, plus tard dans la journée ou peut-être même dans dix minutes, je vais pleurer. Et tu ne pourras rien y faire.
- Je sais ce que tu veux. Tu veux savoir pourquoi je n'ose pas te toucher.
- Oui. Bizarrement, ça m'interesse. Si je te dégoûte, je veux le savoir.

Alexis déposa sa tasse sur la table basse. Il prit la main libre d'Ariane dans la sienne.

- Sors-toi de la tête que tu me dégôutes. Ce n'est pas ça. Loin de là. Quand tu dors dans mes bras, je dois faire des efforts surhumains pour retenir mes envies. C'est la peur de te blesser qui m'arrête. Si ce n'était pas de ça, il y a longtemps que j'aurais succombé.

Étonnée, Ariane déposa sa tasse et alla se coller contre son copain. Elle était rassurée de savoir qu'elle ne lui faisait pas horreur. Mais en même temps, elle craignait qu'il aie toujours peur de la blesser.

- Ce qui fait mal, Alexis, c'est d'être forcée. Toi, je t'aime. Tout est différent. Je n'ai pas peur, je ne me sens pas coincée.

Alexis serra Ariane contre lui. Il ne savait pas si un jour, la peur de lui faire du mal le quitterait. L'idée d'être encore plus impuissant devant les larmes de sa copine parce qu'il en serait la cause, il ne supportait pas.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyLun 29 Mai - 0:57

Chapitre six

Audrey



Lorsque son père avait décidé de transformer la chambre d'Ariane en bureau, Audrey avait voulu y prendre quelques souvenirs. Elle s'était glissée, une nuit, dans la chambre de sa soeur qui lui manquait cruellement. En cherchant une photo, la jeune fille trouva un papier avec une adresse. Souhaitant vérifier s'il s'agissait de l'adresse de sa soeur, elle la garda précieusement. Le lendemain, plutôt que de se rendre à la polyvalente, elle prendrait l'autobus pour aller vérifier l'adresse. Depuis le départ d'Ariane, son père était devenu insupportable. L'adolescente de douze ans était surveillée comme une gamine de quatre ans. Curieusement, jamais son père n'avait essayé de retrouver Ariane. C'était comme si elle n'avait jamais existé. La vie dans la maison avait repris son cours. Mais Audrey n'oubliait pas. Elle se sentait si seule depuis le départ de sa soeur.

*****


Arrivée devant le vieil immeuble, Audrey eut un frisson de dégoût. Sa soeur pouvait-elle vraiment habiter cet endroit? Aux yeux d'Audrey, Ariane était douce et délicate. Elle ne s'imaginait pas qu'elle puisse vivre ailleurs que dans une grande maison chaude et confortable. Elle n'imaginait pas sa soeur vivre dans un endroit si peu accueillant. Elle poussa la porte de bois et monta l'escalier jusqu'au dernier étage. Elle frappa à la porte du logement, mais n'eut aucune réponse. Un voisin sortit de chez-lui.

- Si tu cherches Ariane et Alexis, ils sont partis il y a presqu'un mois, lui dit-il.
- Ariane est ma soeur. Vous savez où je peux la trouver?

L'homme disparut un instant et revint avec un bout de papier.

- Je les ai aidés à déménager. C'est l'adresse. C'est à quelques rues d'ici.

Audrey remercia l'homme et quitta l'immeuble. Le coeur battant, elle courru jusqu'à l'adresse qu'elle venait d'obtenir. Devant la porte de l'appartement de sa soeur, elle figea. Elle ne savait pas si elle devait frapper ou retourner sagement chez-elle. Elle allait repartir lorsque la porte s'ourit sur un jeune homme.

- Tu cherches quelqu'un? demanda Alexis, ignorant qu'il avait devant lui, la soeur de sa copine.
- Je cherche ma soeur, Ariane. On m'a dit que je pourrais la trouver ici.
- Euh... Normalement oui, mais elle travaille en ce moment. Je dois aller travailler aussi, mais, si tu veux, je peux t'accompagner jusqu'au café. Au fait, je suis Alexis. Et toi, tu dois être Audrey. Je me trompe?
- Non, c'est bien ça.

Après un quart d'heure de marche, Alexis s'arrêta devant un petit café.

- Tu veux que je t'accompagne à l'intérieur? demanda Alexis.
- Non, ça ira.

Déjà en retard, Alexis continua son chemin. Seule devant la bâtisse, Audrey se demanda si elle devait entrer ou non. Elle craignait la réaction de sa soeur. Elle décida d'entrer quand même.

À l'intérieur, elle repéra facilement Ariane. Audrey alla s'assoir à une table dans un coin tranquille. Elle préférait attendre que sa soeur la voie plutôt que de lui annoncer sa présence. L'attente ne fût pas bien longue. Il n'y avait pas beaucoup de clients. Ariane et Brigitte avaient donc le temps d'observer les allées et venues.

- Ça t'embête si je prend quelques minutes? demanda Ariane à Brigitte. Ma soeur est ici. Je ne l'ai pas vue depuis longtemps.
- Si c'est pour ça, petite, prend donc le reste de la journée. Je vais me débrouiller sans toi.
- Merci.

Ariane alla s'assoir devant sa jeune soeur. Elle lui laissa le temps de l'observer. Les yeux d'Audrey se remplirent de larmes. Ariane jugea bien inutile de la sermoner pour la journée d'école manquée.

- Comment m'as-tu retrouvée?

Audrey raconta à sa soeur comment, à partir d'une adresse écrite sur un bout de papier, elle s'était rendue jusqu'à elle. Ariane l'écouta jusqu'au bout. Elle était soulagée que ce ne soit pas son père, en vidant la chambre, qui soit tombé sur son adresse.

Lorsqu'Audrey eut terminé son récit, Brigitte se présenta à la table avec une part de gâteau et un verre de lait qu'elle déposa devant la jeune fille. Quand Ariane mit une main dans sa poche, Brigitte l'arrêta.

- C'est gratuit et ne me remercie pas. Ça me fait plaisir.

Lorsque sa soeur eut fini de manger, Ariane l'entraina dehors. Les filles marchèrent en direction de chez Ariane

- Je vais devoir te garder pour la nuit. Le prochain autobus qui pourra te ramener à la maison n'est que tard en soirée. Je ne veux pas te savoir dehors la nuit. Il y aura un autre autobus demain matin.
- Tu ne rentreras pas, c'est ça? demanda Audrey, les larmes aux yeux.
- Jamais, Audrey. Je ne vais jamais revenir à la maison. C'est mieux comme ça.
- C'est pour Alexis que tu es partie?
- Non. Je ne le connaissais pas avant de partir.

Ariane invita sa soeur à monter chez elle. Elle ne savait pas quoi dire pour calmer la jeune fille qui avait tant souhaité la retrouver. Elle ne voulait pas lui révèler la raison de son départ. Elle lui fit visiter l'appartement. Audrey était triste. Elle retrouvait sa soeur et apprenait qu'elle ne voulait pas revenir avec elle à la maison.

*****


Lorsqu'Alexis rentra, il trouva les deux filles assises sur le divan en train de bavarder. Il fit signe à sa copine de le suivre dans la chambre. Il referma la porte derrière eux.

- Tu crois qu'il est sage de la garder ici, Ariane?
- Tu veux que je lui dise de coucher dehors? Elle a douze ans. Elle ne va pas savoir où aller si je la jette dehors. C'est ma petite soeur. Je vais au moins lui permettre de passer une nuit au chaud avant de la renvoyer chez-elle.
- Que feras-tu si elle donne ton adresse à ton père? Je ne veux pas le voir débarquer ici.

Alexis tremblait de rage à l'idée de voir Ariane partir avec son père. Seulement l'idée qu'elle puisse être forcée de noueau à faire la poupée bien élevée pour des hommes faits le rendait malade. Ariane lui entoura la taille de ses bras et posa sa tête sur son épaule.

- Mon père ne va pas débraquer ici parce qu'Audrey ne dira rien. Elle sait que je ne vais pas rentrer avec elle.

Alexis se libéra des bras d'Ariane. Il retrouva Audrey dans le salon.

- Audrey, ta soeur a un rendez-vous. On l'accompagne.

*****


Pour la première fois, dans le bureau de la psychologue, Ariane eut l'impression d'avoir quelque chose à dire. Elle prit place dans le gros fauteuil et attendit les questions. Le Docteur Desrochers commença par revenir sur la dernière rencontre. Ariane raconta sa discussion avac Alexis.

- Rien n'a encore changé, mais je sais que je ne le dégoûte pas. Il a peur, c'est tout. Par contre, je ne voudrais pas que ça nous empêche de vivre normalement.
- Dis-moi, tu as passé une bonne semaine?

Ariane hésita un moment.

- Ma soeur m'a retrouvée. Alexis a peur qu'elle donne mon adresse à mon père et qu'il vienne me chercher. J'avoue que ça m'a traversé l'esprit. Elle m'attend avec Alexis. Je ne lui ai pas raconté pourquoi je suis partie.

La psychologue prit un moment pour réfléchir.

- Je ferais bien entrer ta jeune soeur. Seulement si tu es d'accord, bien-sûr.
- Je veux bien. Par contre, je ne vois pas pourquoi.

Ariane se leva et alla chercher sa soeur. Elle lui montra un des fauteuils et l'invita à s'y assoir.

- Bonsoir, Audrey. Je m'appelle Cynthia Desrochers. Je suis la psychologue de ta soeur. Tu veux bien nous aider?

Audrey fit un signe de tête affirmatif. Elle était un peu intimidé par cette grande femme trop bien coiffée.

- Je voudrais que tu dises à ta soeur comment tu te sens depuis qu'elle est partie.

Puis, s'adressant à Ariane, elle ajouta:

- Toi, tu ne dis rien. Peu importe ce qu'elle dit, tu ne lui coupe pas la parole. Tu dois la laisser aller au bout de ce qu'elle a à dire.

Un peu gênée, Audrey se tourna vers sa soeur. Il y a tellement de choses qu'elle voulait lui dire. Ariane, elle, n'était vraiment pas certaine d'avoir envie d'entendre ce que sa soeur avait à lui dire.

- Un matin, je me suis réveillée et quand je suis descendue en bas, maman m'a demandé d'aller te chercher. Je ne t'ai pas trouvée. Tu aurais pu laisser un mot. J'allais te réveiller tous les matins. C'est moi qui l'aurait trouvé. Mais non, pas de message. À la place, en sortant dehors pour aller prendre l'autobus, j'ai trouvé ta clée près de la porte.

Audrey prit une minute pour reprendre son souffle.

- Le soir, tu n'es pas rentrée non plus. Je voulais que papa appelle la police, mais il n'a pas voulu le faire. Il disait que tu allais rentrer bien vite. Mais tu n'es jamais rentrée. Je t'ai attendue. Je voulais que tu reviennes. J'avais besoin de toi.

Voyant que le visage de sa soeur était noyé de larmes, Audrey s'arrêta. Avant qu'elle ne puisse se lever, le Docteur Desrochers lui fit signe de continuer.

- Je ne vais pas dire a nos parents où tu habites, Ariane. Je sais que tu étais malheureuse chez-nous. Je t'entendais souvent pleurer la nuit quand tu rentrais tard. Je dis seulement que tu aurais pu penser un peu à moi et ne pas partir sans me dire aurevoir. Sept mois sans nouvelles de toi! Sais-tu ce qui peut arriver en sept mois, Ariane? Je vais te le dire. Durant les sept derniers mois, j'ai eu douze ans, j'ai commencé la polyvalente, j'ai eu mes premières règles et je me suis fait percer le nombril en cachette! J'aurais voulu que tu sois près de moi. Probablement que tu m'aurais empêché de me faire percer le nombril, mais au moins, tu aurais été là.

Audrey avait des sanglots dans la voix. Le Docteur Desrochers lui demanda de sortir du bureau. Audrey quitta la pièce et ferma la porte. Furieuse et triste, Ariane pleurait. Sur ses joues rouges, les larmes coulaient doucement.

- Sais-tu où j'ai voulu en venir, Ariane?

La jeune femme secoua négativement la tête.

- La réalité, ce n'est pas seulement ta nouvelle vie avec Alexis. Même si, pour toi, partir de la maison familiale était une bonne solution, tu as blessé des gens. Ta soeur t'aime, Ariane. Elle a souffert de ton départ, de ton absence. Tu dois en être consciente. Lorsque tu prend une décision, tu dois apprendre à vivre avec les conséquences même si ça ne te plaît pas. Les gens que tu laisses derrière toi ont des sentiments eux aussi.

Ariane cessa de pleurer. Elle savait que la psychologue avait raison. Elle se leva. Elle s'attendait à ce que le Docteur Desrochers lui dise de rester, mais elle la regardait sans un mot. Ariane hésitait près de la porte.

- Tu peux y aller. Je crois que tu en a eu assez pour ce soir.

Ariane quitta la pièce, soulagée de pouvoir partir.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyLun 29 Mai - 1:12

Chapitre sept

Une nuit qui change tout



Alexis regardait Ariane endormie près de lui. Sous le drap, se dessinait le corps de sa copine. Combien de fois, pour éviter de lui faire du mal, il avait retenu ses plus brûlants désirs? Il ne savait plus les compter. Il l'avait tellement regardé dormir. Il avait passé des nuits entières à le faire, tiraillé entre son envie d'elle et sa crainte de la blesser.

Sachant très bien qu'il ne trouverait plus le sommeil cette nuit-là, Alexis quitta la chambre. L'horloge indiquait quatre heures. Encore trois heures à tuer avant que ne sonne le réveil-matin. Comme chaque fois qu'il ne dormait pas, Alexis mit la cafetière en route.

Il ne craignait pas le refus d'Ariane. Il avait plutôt peur qu'elle n'ose pas l'arrêter ou simplement refuser parce qu'elle n'en avait jamais eu le droit. Il était terrorisé à l'idée de devenir un bourreau sans le vouloir. Jamais il ne pourrait l'accepter.

*****



Ariane, réveillée par l'absence d'Alexis, savait bien ce qui le tenait réveillé. Elle se leva, quitta la chambre et alla s'interposer entre son copain et le journal de la veille qu'elle lui retira des mains.

- Tu crois que ça va passer en buvant du café et en lisant des vieilles nouvelles?
- J'en doute, mais j'essaie quand même.

Ariane le força à se lever et l'embrassa.

- Tu sais, j'ai entendu dire qu'il y avait des méthodes plus efficaces. Il faudrait vérifier.

Alexis ne savait pas comment réagir. Pour éviter de blesser Ariane, il était prêt à devenir aussi chaste qu'un homme d'Église. Par contre, ce soir-là, sa belle ne semblait pas du tout d'accord. S'il s'arrêtait à penser à ces longs mois passés à dormir avec elle, à échanger quelques caresses, il devenait encore plus fou de désir. Même s'il savait se dominer, il restait un homme. Il ne savait pas s'il devait la repousser gentiment ou profiter du moment. Malgré toute sa bonne volonté, il en avait assez de se faire violence pour résister à ses envies. Elle ne lui laissa pas le temps d'y penser. Elle l'attira vers la chambre. Près du lit, il l'arrêta.

- Ariane, je...
- Non. Il n'y a aucun fantôme dans ma tête.
- Ce n'est pas ça. C'est juste que... Je t'aime.
- Je sais.

*****


Lorsque le réveil sonna, Ariane, plutôt que de se lever d'un bond et de filer sous la douche, attrapa le téléphone. Brigitte accepta de la remplacer. Ariane avait autre chose en tête. Elle réveilla Alexis et lui demanda de prendre congé lui aussi. Elle avait besoin de lui pour mettre un terme à ses cauchemars.

- Que veux-tu faire au juste?
- Arrêter d'avoir peur.
- Comment tu penses t'y prendre?
- Il faut que je parle à mon père. Après, peut-être que j'irai voir la police, mais je veux dabord l'entendre lui.

Alexis n'en croyait pas ses oreilles. Depuis qu'il connaissait Ariane, il rêvait du moment où son père serait sous les verroux. Maintenant, il n'en était plus certain. Bien sûr, il souhaitait encore voir cet imbécile payer pour ses actes, mais il n'osait pas imaginer Ariane affronter son père. Elle lui semblait si fragile. Pourtant, elle parlait sérieusement. Il ne savait pas ce que cette nuit avait réveillé chez sa copine, mais il en avait peur.

- Ariane, tu es certaine que tu vas bien.
- Non. Je ne vais pas bien. Ça fait des années que je ne vais pas bien. J'ai envie que ça s'arrête. Tu ne m'empêcheras pas d'y aller. Le seul choix que tu as, c'est de m'accompagner ou pas.
- Je ne te laisserai pas y aller seule.
- Alors fais vite. Je ne veux pas manquer l'autobus. Je ne sais pas si demain, j'aurai le même courage. Je ne veux plus que son ombre plane au dessus de ma tête. Je serai libre quand il ne le sera plus.[/center]
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyLun 29 Mai - 22:23

Chapitre huit

Des choses à dire



Dans l'autobus, Ariane se serait grattée au sang si Alexis ne lui avait pas tenu la main. Elle était nerveuse comme elle ne l'avait jamais été avant. Même si elle essayait de faire croire le contraire à Alexis, elle n'aurait jamais pu se rendre seule chez son père. Elle aurait manqué de courage et serait descendue au premier arrêt.

À ses côtés, Alexis faisait ce qu'il pouvait pour garder son calme. Il ne pouvait pas imaginer ce que serait sa réaction devant le père de sa copine. Il ne voulait pas y penser parce que seulement l'idée qu'il puisse vouloir garder Ariane sous son toît le rendait agressif.

- Tu es certaine qu'il sera là?
- Il ne travaille jamais le dimanche. C'est la journée qu'il consacre à sa famille. Personne ne sort le dimanche. À l'heure du souper, il y aura ses parents, mais nous aurons probalement déjà quitté les lieux.
- Mais il n'y aura pas d'autobus avant vingt heures.
- Je sais. On trouvera quelque chose à faire. Ne t'en fais pas. Nous n'allons pas rester pour le souper. Je ne m'y sentirais pas à ma place et toi non plus.

L'autobus s'immobilisa. Avant de sortir, Ariane vérifia plus d'une fois si elle n'y laissait pas quelque chose. Alexis la tira par la main. Il n'était pas pressé d'arriver chez le père de sa copine, mais plus vite ils s'y rendaient, plus vite ils en sortiraient. Le terminus n'étant qu'à quelques rues de là, ils arrivèrent rapidement devant la grosse maison de peirres où Ariane avait grandit.

- Tu ne changes pas d'avis, Alexis? Tu viens toujours avec moi?
- Je ne te laisserai pas entrer sans moi.

N'ayant plus sa clée, Ariane sonna. C'est Audrey qui ouvra la porte.

- Salut Audrey. Ne dis rien. Laisse-nous entrer. Il faut que je parle à papa, mais je n'ai pas envie de le faire coincée près de la porte. Vas le chercher, s'il te plaît. Je ne veux pas que maman entende ce que j'ai à lui dire.
- D'accord.

Audrey céda le passage à sa soeur et Alexis. Elle retourna au salon pour aviser son père. L'homme arriva rapidement devant sa fille aînée. Ne sachant pas quoi faire et encore moins quoi dire à cet homme, Alexis garda la main d'Ariane dans la sienne.

- Vas dire bonjour à ta mère, Ariane. Après tous ces mois d'absence, tu lui dois bien ça.
- Non. C'est à toi que je veux parler. Je ne suis pas venue pour elle.

D'un petit geste de la tête, Robert invita sa fille à le suivre. Refusant de laisser la main d'Ariane, Alexis suivit également. Robert les guida jusqu'à l'ancienne chambre d'Ariane qui était devenue son bureau. La pièce était vaste. Robert y avait installé un divan de cuir sur lequel Ariane et Alexis prirent place. Robert s'instala sur son gros fauteuil devant eux et observa Alexis.

- Ce jeune homme sort d'ici.
- Non, monsieur. Je partirai lorque votre fille vous aura dit ce qu'elle a à vous dire.
- Tu apprendras peut-être des choses sur elle que tu aurais préféré ignorer.
- J'en doute.

Alexis faisait des efforts surhumains pour ne pas se lever et étrangler de ses mains l'homme qui se trouvait devant lui. Il n'en revenait pas qu'il ose parler comme si Ariane était responsable de ce qui lui était arrivé.

- De quoi veux-tu me parler, Ariane? lui demanda son père
- Je veux dénoncer ce que tu m'as fait subir durant trois ans.

Elle ne le croyait pas. Elle l'avait dit sans hésiter. Elle n'avait même pas cherché ses mots. Elle regardait son père droit dans les yeux. Elle attendait. Elle voulait entendre sa réaction. Elle voulait qu'Alexis l'entende aussi.

- Fais-toi soigner, jeune fille. Tu délires.
- Je me fais déjà soigner pour réussir à vivre avec les souvenirs de ce que tu m'as forcé à faire. Tu m'as tranformé en poupée pour faire de l'argent.
- Tu accompagnais et rien d'autre.

Alexis bouillait de rage. Il écoutait Robert parler comme si Ariane avait eu une adolescence tout à fait normale et avait envie de hurler. À ses côtés, Ariane semblait en pleine possession de ses moyens. Elle semblait prête à toute entendre et avait une réponse à toutes les répliques de son père.

- Rien d'autre? Les trois premiers mois, peut-être bien. Une fois que tes amis ont senti qu'ils avaient ta confiance, tout a changé. Je n'accompagnais plus. J'étais carrément devenue une putain. Certains de ces hommes ont des enfants de mon âge. J'allais à l'école avec eux. J'aurais dû répondre quoi à ceux qui me demandaient comment s'était passé ma fin de semaine? Je ne me voyais pas très bien dire à une amie que, bien malgré moi, j'avais partagé le lit de son père!
- J'avais fixé une règle, Ariane. Ils n'avaient qu'à la respecter. Je ne suis pas responsable.
- Tu le diras à la police, papa.

Cette fois, Ariane tremblait. Elle n'avait pas peur. Elle était enragée. À cet instant, elle aurait voulu voir son père mort.

- Qui croiront-il à ton avis, Ariane? Un homme d'affaire puissant ou une jeune fugueuse ingrate?
- Nous verrons bien, monsieur, qui ils croiront, répondit Alexis.

Incapable d'en entendre davantage, Alexis pris sa copine par les épaules et l'entraina hors de la pièce. Arrivé près le la porte, le couple fût interrompu par la mère d'Ariane.

- Tu pars sans me saluer et sans me présenter ton copain, Ariane?
- Bonjour maman. Je te présente Alexis. J'aurais aimé que vous fassiez connaissance dans d'autres circonstances, mais nous ne pouvons pas rester.
- Tu ne vas pas repartir comme ça?
- Nous ne pouvons pas reter. Nous sommes attendus, dit Alexis pour mettre un terme à cet échange.

Sur ces mots, il prit Ariane par la taille et l'amena dehors. Il la connaissait bien et savait qu'elle allait bientôt fondre en larmes. Il souhaitait seulement être déjà parti à ce moment. Ayant repéré un petit restorant à son arrivée, il s'y dirigea. Ariane se laissait guider. Elle était trop éprouvée pour faire quoi que ce soit d'autre. À l'intérieur, Alexis repéra une petite table à l'abri des regards. Il invita Ariane à s'y assoir.

- Cesse de te retenir, Ariane. Tu vas éclater.

Avant même qu'Alexis ne termine sa phrase, de grosses larmes se mirent à couler sur les joues d'Ariane. Elle venait de revivre tous ses cauchemars. Elle mit beauoup de temps à se calmer. Alexis buvait tranquillement son café en attendant que sa copine dise quelque chose.

- Je veux continuer, Alexis. J'ai dit à mon père que j'irais voir la police et je veux y aller. Laisse-moi juste une semaine ou deux. Le temps de reprendre mon souffle.
- D'accord.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyMar 30 Mai - 23:33

Chapitre neuf

Boulversée



Chez son père, Ariane n'avait rien laissé paraître. Elle était restée calme. Cependant, depuis qu'elle était sortie de la maison de son enfance, elle tremblait. Alexis avait passé la nuit près d'elle à murmurer des paroles rassurantes, mais Ariane réagissait très peu. Elle réclamait souvent la présence de son copain, mais restait presque toujours muette. Sa rencontre avec son père lui avait fait plus de mal qu'elle ne voulait le croire. Alexis le savait bien. Il restait donc près d'elle, silencieux et attentif.

*****


Assise devant sa psychologue, Ariane ne disait rien. Le Docteur Desrochers avait l'habitude du silence de sa jeune patiente et réussissait toujours à le briser. Elle savait que lorsqu'Ariane ne disait rien ou se grattait de façon compulsive, c'est qu'elle n'allait pas bien. Ce soir, Ariane combinait ces deux comportements.

- Tu sais, ça ne va pas être facile pour toi de travailler avec une plaie sur la main.

Ariane cessa de se gratter et croisa les mains sur ses genoux comme une enfant prise en faute.

- Montre-moi tes mains, Ariane.

La jeune femme posa les mains sur le bureau. Elles étaient couvertes de plaques rouges et de sang sêché.

- Je vois que ta semaine a été difficile. Je n'ai jamais vu tes mains dans un état pareil. Qu'est-ce qui s'est passé cette semaine?
- J'ai vu mon père.
- Ça explique tes mains. Il t'a trouvé ou tu y es allée par toi même?
- C'est moi. Je suis allée lui dire que je voulais porter plainte contre lui.

Ariane voulut recommencer à se gratter, mais s'arrêta. Son visage se crispa de douleur. Elle s'était déjà tellement grattée qu'elle n'avait plus de peau saine sur le dessus des mains. Elle raconta sa rencontre avec son père. Elle dût souvent s'arrêter pour reprendre son souffle, mais arriva quand même à terminer son récit.

- Et maintenant, que veux-tu faire?

Ariane expliqua son désir de mettre cette partie de sa vie derrière elle. Pour cela, elle savait qu'elle devait dénoncer son père.

- Je vois, Ariane. Jusqu'à ce que tout ça soit terminé, je voudrais te voir deux fois par semaines. Je sais que tu n'aimes pas venir ici. Je te rassure, je n'ai pas beaucoup de patients qui aiment venir dans ce bureau, mais fais-moi confiance, tu en auras besoin.
- Je suis d'accord. Je viendrai deux fois.

Ariane n'avait pas du tout envie de voir sa psychologue plus souvent. Elle acceptait parce qu'elle savait qu'elle aurait besoin de parler et elle n'était pas certaine de pouvoir tout dire à Alexis. Bien sûr, il accepterait toujours de l'écouter, mais elle, souhaitait une oreille plus neutre.

- Tu peux aller rejoindre Alexis. Je te revois jeudi à l'heure habituelle.

Ariane se leva et quitta la pièce. Alexis l'attendait. Comme le temps était frais, Ariane essaya de mettre ses gants. Ses mains étaient si douloureuses qu'elle étouffa une plainte et rangea ses gants dans sa poche. Alexis, qui craignait que le vent agrave la situation, sortit ses mitanes et aida Ariane à y glisser ses mains. Le tissus n'ayant pas touché les plaies, Ariane ne grimaça pas.

*****


Cette nuit là, Ariane fût tenue éveillée par la douleur. Elle fixait ses mains. Le Docteur Desrochers n'était pas la seule à ne jamais les avoir vues dans un tel état. La jeune femme ne s'était jamais rendue aussi loin. À chaque mouvement, elle se retenait pour ne pas hurler.

Près d'elle, Alexis ne dormait pas non plus. Il était inquiet pour sa copine. Il avait du mal à accepter qu'elle se blesse volontairement. Il passa son bras autour de sa taille et l'attira contre lui.

- Tu vas t'arrêter ou trouver ailleurs où t'arracher de la peau?
- J'ai bien trop mal pour y penser. Je n'arrive même pas à dormir.

Alexis se leva et quitta la chambre pour revenir une minute plus tard avec une trousse de premier soins. Il prit place près de sa copine.

- Je ne vais pas te laisser le choix cette fois, Ariane, lui dit-il en ouvrant sa trousse. Tes mains ont besoin d'être soignées.
- Ça guérira tout seul. Je vais survivre. Je ne les soigne jamais.
- Je t'ai vu te gratter souvent. Jamais tu n'as eu les mains dans cet état, répliqua Alexis en prennant la main d'Ariane dans la sienne.

Ayant trop mal pour se débattre, Ariane laissa Alexis couvrir ses plaies. Elle avait si mal qu'elle se mordait la lèvre pour ne pas hurler. Pourtant, elle était incapable de dire qu'elle n'allait pas recommencer. Lorsqu'il eut terminé, Alexis caressa doucement le visage humide d'Ariane.

- Explique-moi, Ariane. Comment tu peux en arriver à t'arracher la peau des mains de cette façon?
- Tu veux vraiment savoir ça?
- Est-ce que j'ai l'habitude de poser des questions sans vouloir une réponse?

Ariane se redressa pour que ses yeux soient à la hauteur de ceux de son copain.

- Si je me souviens bien, ça a commencé en même temps que les histoires avec mon père. Je ne me souviens pas l'avoir fait avant. Le premier soir, quand je suis rentrée à la maison, j'étais écorchée, mais je ne pouvais pas en parler. Je me suis mise à pleurer dans mon lit et sans trop y penser, j'ai commencé à me gratter la main. J'ai arrêté quand j'ai senti qu'il manquait réellement de la peau. Cette douleur-là, je pouvais me l'expliquer. J'ai recommencé souvent. Plus j'avais mal, plus je me grattais. Je le fais machinalement, maintenant. Quand je ne vais pas bien, je me gratte. Ça fait mal, mais au moins, je sais pourquoi. Je peux le voir.

Alexis ne savait pas quoi dire. La franchise d'Ariane le jettait par terre.

- Je n'aurais pas dû parler. C'est plus facile de croire que ceux qui s'auto-mutilent sont des fous qui le font par plaisir.
- Je n'ai jamais pensé que tu étais folle, Ariane. Perturbée, oui, mais pas folle.

Il se leva et alla porter sa trousse de premiers soins. À son retour, Ariane dormait déjà. Il se coucha pres d'elle et l'attira doucement contre lui.

Comment ai-je pu tomber amoureux d'une fille comme elle? pensa Alexis.

Incapable de trouver le sommeil, il se leva. Assis par terre dans le salon, il réfléchissait. Avait-il trop poussé Ariane à parler alors qu'elle n'y était peut-être pas prête? Il se sentait affreusement coupable lorsqu'il voyait ses mains couvertes de plaies. Depuis qu'il la connaissait, il l'avait souvent vu se gratter. Malgré ses explications, il ne comprenait pas vraiment. Ce qui le dérangait le plus, c'est qu'il n'y pouvait rien. En levant les yeux, il vit Ariane debout adossée au mur. Il lui tendit la main. Elle s'instala par terre avec lui.

- J'ai peur, Alexis.
- Ça t'empêche de dormir?
- Non. Ça c'est ton absence dans mon dos.
- Qu'est ce qui te fait peur?
- Moi. J'ai revu mon père et je me suis pratiquement arraché la peau des mains. Je vais faire quoi lorsque j'engagerai les procédures judiciaires? M'arracher les deux bras?

Ça, Alexis n'arrêtait pas d'y penser. Il avait cent fois retourné la question. Il aurait bien aimé pouvoir empêcher qu'Ariane se blesse, mais il ignorait comment. Il n'allait tout de même pas l'attacher.

- Je ne sais pas ce qui se passera, Ariane. Ça m'inquiète, je l'avoue. Je ne voudrais pas te voir t'arracher la peau jusqu'au coudes. Ça me fait aussi mal qu'à toi.

Une larme roula sur la joue d'Ariane. Elle savait que son copain était sincère. Elle aurait voulu lui promettre de ne plus se faire de mal, mais ce serait impossible à tenir alors elle resta muette.

- On trouvera quelque chose, Ariane. Il y a surement une façon de te permettre de poursuivre ton père sans te détruire.
- Je ne sais pas. Je ne vois pas comment, sauf si tu m'attaches les mains derrière le dos.
- Tu ne le supporterais pas.

Elle le regardait, muette. Il lui prit les poignets et lui amena derrière le dos. La réaction d'Ariane fût instantanée. Elle se leva d'un bond et disparut dans la salle de bain en claquant la porte.

Il y a des fois où un homme donnerait tout pour avoir tort, pensa Alexis
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyMar 30 Mai - 23:51

Chapitre dix

Avant la bataille



Durant les deux dernières semaines, Ariane avait rencontré tellement de gens et raconté son histoire tellement souvent qu'elle n'en pouvait plus. Elle avait l'impression que sa vie ne lui appartenait plus. Il restait moins d'une semaine avant le début du procès. Plus le temps passait, plus elle angoissait. De son côté, Alexis essayait de rassurer sa copine. Il faisait ce qu'il pouvait pour lui rendre la vie plus facile.

Doucement, Alexis retirait les bandages sur les mains d'Ariane.

- C'est paratiquement guéri, dit Alexis. Tu veux les laisser à l'air libre?
- Je ne sais pas si c'est bien sage. Avec les bandages, je ne pouvais plus me gratter.
- Ce n'est pas que je n'aime pas jouer les infirmiers, mais il y a plein d'autres choses que tu ne pouvais pas faire seule.
- C'est encore sensible. Pour le moment, ça ira. Je ne crois pas que ce soit très risqué de les laisser finir de guérir à l'air.

Lorsqu'elle voulut se lever, Ariane se mit à trembler. Alexis s'approcha d'elle et prit ses mains dans les siennes.

- À quoi tu penses?
- Quand je suis allée voir mon père, c'est moi qui décidait ce que je voulais dire. Là, je devrai répondre à des questions auquelles je n'ai pas vraiment envie de répondre. Dans la salle, il y aura sûrement ma mère et ma soeur. Elles entendront des choses que je ne veux pas qu'elles sachent. Lorsque j'ai rencontré les policiers, ils m'ont fait dire des choses que je n'ai jamais dit. Ils en savent même beaucoup plus que toi.

Doucement. il la fit lever et l'attira contre lui.

- Je ne peux pas parler pour ta mère et ta soeur. En ce qui me concerne, je taime, et même si tes paroles devaient m'écorcher vif, je ne changerai pas d'avis. J'avoue que je ne te comprend pas toujours. Je ne sais pas si c'est parce que je suis un imbécile. Si c'est le cas, je suis un imbécile amoureux alors ne t'inquiète pas pour moi.
- D'accord, mais tu n'es pas imbécile.

*****


Assise devant sa psychologue, Ariane était nerveuse. C'était la dernière fois qu'elle la voyait avant le procès. Elle aurait voulu crier, expliquer qu'elle n'était pas prête, qu'elle avait besoin d'une pause, mais elle restait muette.

- Ça commence lundi, Ariane. Il y a quelque chose en particulier dont tu voudrais qu'on parle?
- Mon avocate m'a dit que vous seriez appellée à témoigner et ça m'inquiète. Je ne savais pas que ce que je dirais ici serait utilisé durant le procès.
- J'ai dû produire un rapport concernant ta santé mentale. Si j'avais refusé de le faire, il aurait fallu que tu rencontres quelqu'un d'autre et ça aurait retardé le procès de plusieurs semaines ou même plusieurs mois. Nos conversations dans ce bureau restent dans ce bureau. Le but, ce n'est pas de te faire passer pour folle, mais de prouver que les agissements de ton père ont eu un impact négatif sur ta qualité de vie. Ton avocate ne t'a rien expliqué?
- Je n'ai pas demandé. Maitre Dupuis me gêne un peu.
- Je la connas de réputation seulement, Elle manque un peu d'humanité à ce qu'on dit. Tu aurais pu changer, tu sais.
- Je sais. mais il est un peu tard pour y penser, maintenant. Alexis ne l'aime pas beaucoup. Il refuse de me laisser seule avec elle.

Ariane se leva pour aller s'assoir au bord de la fenêtre.

- Tu l'aimes bien cette fenêtre, je crois. Je n'ai jamais pensé à te demander pourquoi.
- J'ai l'impression d'être assise dans le mur, mais je n'y suis pas prisonnière.
- C'est interressant comme concept. Je n'y avait jamais pensé. Alexis t'accompagnera au tribunal?
- Il prendra congé chaque fois qu'il le faudra. Son patron est d'accord.
- Tu sais que tu as un copain en or? Ce genre d'évènement est souvent très éprouvant pour un couple.
- Il m'a connue complètement détruite. Je parlais à peine et je le laissais rarement m'approcher. Il est quand même resté. Sans lui, je ne sais pas si j'aurais eu la force de me rendre où je suis aujourd'hui. Il a une force tranquille que je n'ai jamais eu et que je n'aurai probablement jamais.
- Tu n'es pas tranquille, c'est vrai, mais tu es plus forte que tu le crois, Ariane. Il y a six mois, c'est un adolescente complètement perdue qui est entrée dans ce bureau. Maintenant, je discute avec une jeune femme qui sait un peu plus où elle va.

Ariane ne répondit pas. Elle n'avait jamais réfléchi à tout ce qui avait changé en elle dans les derniers mois.

- Va te reposer, Ariane. Je te revois lundi matin au tribunal. Fais attention à tes mains.
- D'accord.

Ariane quitta le bureau, mais ne se sauva pas comme elle avait l'habitude de le faire. Elle retrouva Alexis et quitta l'édifice. Dehors, la première neige tombait.

- Dans un peu plus d'un mois, Ariane, ce sera Noël et si nous avons de la chance, ton père sera en prison.
- Si c'est le cas, ne te casse pas la tête à magasiner. J'aurai déjà tout ce que je veux.

Alexis s'arrêta et emprisonna sa copine dans ses bras.

- J'ai profité de ton rendez-vous pour faire quelques appels. Brigitte te remplace pour la fin de semaine et mon patron m'a assuré qu'il pouvait se débrouiller sans moi. Comme je suis cuisinier et pas un riche héritier, je ne peux pas t'amener au bord de la plage, mais je sais comment on débranche un téléphone. Pour les trois prochains jours, je ne fais la cuisine que pour toi et je te défend de réfléchir. La télévision n'existe plus, nous vivrons à la lueur des chandelles et nous retrouverons la réalité lundi matin pour le début du procès.
- Mais nous n'avons pas les moyens de ne pas travailler durant trois jours. Les factures vont s'accumuler...

Pour la faire taire, Alexis l'embrassa.

- L'interdiction de réfléchir commence maintenant.

Comprenant qu'elle n'avait rien à dire, Ariane resta muette et marcha avec son copain. Avec le procès qui allait débuter, un peu de répit lui ferait le plus grand bien.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyMar 30 Mai - 23:54

Chapitre onze

Une journée difficile



Devant le palais de justice, Ariane était figée. Alexis dût la pousser pour qu'elle entre. Rapidement, il repéra le Docteur Desrochers sur un banc. Il guida Ariane vers elle et la fit assoir. En apercevant Robert un peu plus loin, Alexis eu un haut le coeur. La vue de cet homme le dégoûtait.

- Comment vas-tu ce matin, Ariane? lui demanda la psychologue.
- J'ai peur. J'ai l'estomac noué. Je n'ai rien pu avaler ce matin.
- Je suis ici pour la journée. Si ça ne va pas, tu n'as qu'à le dire
- C'est plus stressant que je le cryais, ajouta Alexis.

Ariane glissa sa main dans celle de son copain. Elle était tellement prise avec ses propres craintes qu'elle en avait oublier celles d'Alexis. L'issue du procès aurait un impact sur sa vie aussi puisqu'il partageait la sienne.

- Comment vont tes mains, Ariane? lui demanda la psychologue.
- Je les tiens occupées. C'est difficile, mais je ne les ai pas grattées depuis la dernière fois. J'ai eu un choc en les voyant couvertes de sang.
- Ton avocate nous fait signe. Tu viens?

En voyant son avocate près de la grande porte de bois, Ariane se mit à trembler.

- Allez-y, Docteur, dit Alexis. Je m'en occuppe.

Lorsque la psychologue eut rejoint l'avocate, Alexis pris les mains d'Ariane dans les siennes.

- Tu as deux choix. Je peux te prendre dans mes bras et te sortir d'ici. Je peux aussi t'aider à te lever et entrer avec toi dans cette salle. C'est toi qui décide.

Alexis se leva. Ariane s'accrocha à son bras et se dirigea vers la salle d'audience. À l'intérieur, elle repéra son avocate, mais refusa de laisser le bras d'Alexis. Il s'instala donc près d'elle. Comme personne ne lui demandait de s'assoir ailleurs, il présuma qu'il était à sa place.

*****


Lorsque les portes se refermèrent, Alexis fit le tour de la salle des yeux. Près de Robert, il y avait la mère d'Ariane. Il savait qu'Audrey n'assiterait pas au procès. Elle n'y aurait pas été à sa place. Ariane tenait sa main si fort qu'il ne sentait plus ses doigts.

Quand son avocate l'appella, Ariane quitta sa place et s'avança. Même si elle semblait sûre d'elle, elle était morte de peur. Elle répondit à toutes les questions sans laisser paraître son inconfort. Lorsque l'avocat de son père arriva devant elle, elle aurait tout donné pour être ailleurs. Il essayait qu'elle se mélange dans ses propos. Bien préparée par son avocate, Ariane ne céda pas sous la pression. Seule la dernière question lui causa plus de malaise.

- Vous avez quitté le domicile familial illégalement à l'âge de seize ans. Si la situation vous dérangeait à ce point, pourquoi ne pas l'avoir fait avant?

La juge croyant la question hors propos, elle ne laissa pas Ariane y répondre. N'ayant plus de questions, l'avocat renvoya la jeune femme à sa place. Ensuite, elle ordonna une pause de deux heures. Ariane ne se fit pas prier pour quitter la salle. En sortant, elle croisa son père.

- Tu as fini de mentir, jene fille? Ta mère est dans tous ses états.

D'un geste protecteur, Alexis attira sa copine contre lui.

- Ce n'est pas elle qui ment, monsieur.

Avant que les deux hommes n'en viennent à des méthodes plus agressives, le Docteur Desrochers s'interposa et poussa le couple vers la sortie.

- Il essaie de vous provoquer. Ne lui donne pas ce qu'il veut. Si tu le frappes, il devient victime.

*****


À son retour dans la salle d'audience, Ariane était un peu plus calme. Si les choses se déroulaient bien, elle n'aurait plus à parler. Elle n'avait qu'à être présente. La suite des évènements étaient hors de son contrôle. Le Docteur Desrochers devait faire part de ses observations. Ariane n'avait pas envie d'entendre. Elle se surprit pourtant à écouter attentivement. La psychologue parla de ses comportements compulsifs, de son silence et de sa peur des contacts. Ariane était un peu gênée. Elle s'accrochait à Alexis qui lui, semblait presque serein. Lorsque la psychologue cessa de parler, Ariane avait le visage baigné de larmes.

*****


Lorsque son père parla, Ariane recommença à se gratter furieusement. Il ne mentait pas, mais parlait comme s'il n'était responsable de rien. Voyant qu'Alexis n'arrivait pas à l'apaiser, le Docteur Desrochers s'adressa à l'avocate.

- Elle n'a pas à entendre ça. Je vais la sortir d'ici.
- Elle devrait rester, lui dit l'avocate sans même jetter un oeil sur sa jeune cliente.
- Ce n'était pas une requête, Maitre Dupuis. Croyez-moi, Ariane sait se gratter. Elle n'aura plus de peau dans dix minutes si elle reste ici.

Sans attendre de réponse, elle prit Ariane par les épaules et l'entraina vers la sortie. Occuppée à voir au bien-être de sa jeune patiente, elle ne se soucia pas des yeux qui s'étaient tournés vers elle.

*****


Assise sur un banc, Ariane se calma sous le regard de la psychologue.

- J'ai manqué de courage. J'ai déjà entendu ce qu'il disait, mais je ne l'ai pas supporté.
- Tu en connais beaucoup, toi, des gens qui supporteraient ça?
- Je ne sais pas. J'y était préparée pourtant.
- Que tu sois présente ou non, ton père se défendra. Ceux qui veulent l'entendre sont dans la salle. Toi, tu es dehors parce que tu allais t'arracherer la peau des mains.
- Je croyais pouvoir me contrôler.
- Donne-toi du temps. Tu as fais ça pendant des années.

*****


En quittant la salle d'audience, Alexis repéra immédiatement sa copine assise sur un banc, le visage dans ses mains. Elle était cachée derrière ses longs cheveux qu'elle n'attachait que pour travailler. Il s'approcha et écarta doucement une mêche de cheveux.

- C'est terminé pour aujourd'hui, Ariane. Nous devrons revenir jeudi pour connaître le jugement. D'ici là, ton père a l'interdiction de quitter son domicile.
- C'est plutôt rapide, dit le Docteur Desrochers. Ça aurait pu durer des mois.
- C'est une femme qui est juge. Elle a deux filles adolescentes. Je crois que ça a eu une influence sur la rapidité des choses, expliqua Alexis.
- Qu'est-ce qu'il va arriver à Audrey? demanda Ariane, inquiète.

Alexis hésita un moment.

- Parle, Alexis. Qu'est ce qui va arriver à ma soeur?
- Audrey est placée temporairement dans une famille d'accueil depuis le début des procédures. C'est pour ça qu'elle n'est pas ici aujourd'hui. Elle restera en famille d'accueil pour un moment encore. Ce n'est pas certain que ta mère soit capable de veiller sur elle convenablement.
- Comment l'as-tu su? demanda la jeune femme.
- Ta soeur a téléphoné pour le dire. Je ne t'ai rien dit sur le coup parce qu'elle ne voulait pas. C'était facile tant que tu ne posais pas de questions, mais je suis incapale de te mentir.

Ariane se leva.

-Je veux rentrer. J'ai assez vu cet endroit pour aujourd'hui.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyMer 31 Mai - 21:08

Chapitre douze

Nouvel orage



Ariane était couchée sur le divan du salon. Elle était pâle, presque transparente. Son père venait d'être condamné à dix ans de prison ferme. Audrey resterait en famille d'accueil jusqu'à sa majorité. Sa mère n'était pas en mesure de voir à son bien-être. Par contre, Ariane pouvait la voir régulièrement. Elle la verrait bientôt, car la jeune fille venait passer ses vacances de Noël avec elle. Malgré que ses souhaits étaient exaucés, la jeune femme n'allait pas bien. Elle n'était pas allée travailler depuis plus d'une semaine.

De son côté, Alexis était heureux du dénouement des évènements. Il n'avait plus à craindre son cruel beau-père. Il passait maintenant à autre chose. Seule sa copine l'inquiètait un peu. Il avait tenté de conduire Ariane chez le médecin, mais elle avait refusé. Pour elle, tout était dû au stress des derniers mois. Il essayait d'être présent et attentif, mais Ariane, contrairement à son habitude, était devenue agressive. C'est en passant voir Brigitte au café qu'il eu réponses à ses questions. L'endroit était désert puisque l'heure de la fermeture approchait. Il avait donc pu s'assoir avec elle à une table un peu en retrait.

- Elle fait quoi, tu dis?
- Rien. Elle ne fait absolument rien. Je quitte le matin, elle est en pyjama dans le salon et quand je rentre, elle y est encore. Il m'arrive de me demander si elle a bougé de là. La nuit, c'est l'enfer. L'un de nous deux fini sa nuit sur le divan à coup sûr.
- T'as pensé à visiter la pharmacie?
- Brigitte, je te dis qu'elle n'est plus la même. Ils ne vendent pas de sirop pour ça.
- Non, mon petit, mais ils vendent des tests de grossesse.
- Quoi?

Il n'y avait pas pensé une seconde.

- Réfléchis, Alexis. Elle est paresseuse, elle pleure tout le temps, elle n'a plus de patience. Si tu ajoutes qu'elle vomit tout ce qu'elle avale, arrête de te poser des questions.
- C'est impossible.
- Pourquoi? Tu es impuissant?
- Euh... Non, mais...
- Mais rien, le coupa Brigitte. Ne me dis pas des choses que je ne veux pas savoir. Vas plutôt dire à ma blondinette que je passerai demain matin. Si tu pouvais être ailleurs à ce moment-là, ça serait bien.
- Je travaille. J'ai trop manqué depuis quelques semaines. Mon patron se venge.
- Pauvre petit. Comme on m'a raconté que les tests de grossesse mordent les hommes, je passerai à la pharmacie demain matin avant d'aller voir Ariane.

En discutant avec elle, Alexis comprit vite pourquoi Ariane appréciait tant cette femme. Elle lisait les gens comme d'autres lisent un livre. Simplement. Elle n'avait aucun souci de plaire. Elle était directe et sympathique. C'est peut-être son petit côté maternel qui plaisait tant à sa copine.

*****


Chez-lui, Alexis trouva sa copine étendue sur le divan, les yeux dans le vide. La télvision fonctionnait, mais Ariane avait l'esprit ailleurs. Elle leva la tête en entendant son copain arriver, mais n'y accorda aucune attention. Alexis n'aimait pas du tout cette nouvelle indifférence.

- Au moins, tu changes de pyjama, dit Alexis. Tu prévois t'habiller un jour? Parce que demain, Brigitte passe te voir. Comme tu ne quitte presque jamais de divan, je lui laisserai la porte déverouillée. Tu n'auras même pas à te lever pour lui répondre.

En approchant, il remarqua des larmes sur le visage d'Ariane. Il s'approcha davantage pour s'assoir en indien devant elle. Il se risqua à essuyer ses larmes. Elle n'eût aucune réaction. Il écarta une mèche de cheveux de son visage.

- Laisse-moi. Ça ne vaut pas la peine.
- Oui, bien sûr, Ariane. Je sais. Je ne devrais pas sècher tes larmes. Je devrais partir. Je serais mieux avec une autre. Tu es un cas désespèré... Je sais tout ça. Tu me l'as déjà dit. Le probème, c'est que personne ne veut d'un imbécile comme moi. Je cuisine mal, je laisse trainer mes vêtements dans la salle de bain, je ne ferme jamais le tube de pâte à dents, mais surtout, je suis déjà amoureux.

Les pluers d'Ariane doublèrent d'intensité. Ne sachant plus quoi lui dire, il se leva, la prit dans ses bras et la porta jusqu'à la chambre. Étendu près d'elle, il passa son bras autour de sa taille. Avant qu'il ne l'attire contre lui, c'est elle qui se colla à sa poitrine.

Elle n'est pas si différente, finalement, pensa t'il avant de s'endormir.

*****


Alexis se réveilla seul. En entendant Ariane dans la salle de bain, il se dit que Brigitte n'avait peut-être pas tort. Cependant, il ne voulait pas imaginer ce que deviendrait sa vie si c'était le cas. Il sa leva, alla mettre la cafetière en route et retrouva sa copine.

- Tu as besoin de quelque chose avant que je parte?
- Si tu pouvais vomir à ma place, ça m'arrangerais.
- Désolé. Tu ne seras pas seule longtemps. Brigitte sera bientôt là.

Effectivement, quelques minutes après le départ d'Alexis, Brigitte passa la porte. Elle trouva Ariane assise dans le salon.

- Alexis m'a dit que tu n'allais pas très bien. Je suis passer le constater de mes yeux.
- N'approche pas trop. C'est peut-être un virus.
- Un virus? J'en doute, ma belle. Si j'en crois ce que m'a raconté ton amoureux, tu n'es pas malade.

Brigitte sortit une petite boite de son sac à main.

- Cinq minutes et tu seras fixée.

Sans un mot, Ariane attrrapa la boite et disparût dans la salle de bain. Elle savait que ses malaises étaient semblables à ceux que ressentent plusieurs femmes en début de grossesse, mais préférait de loin l'hypothèse du virus. En entendant le bruit d'un mirroir qui se brise, Brigitte se précipita dans la salle de bain. Ariane était assise par terre adossée à la machine à laver. En regardant le mirroir, Brigitte sût que la jeune femme l'avait brisé d'un coup de poing. En voyant sa collègue de travail, Ariane jetta furieusement le test de grossesse dans sa direction. Brigitte n'avait pas besoin de regarder. Elle savait qu'Ariane était enceinte.

- Brigitte, je veux que cette chose sorte de moi.
- Tu ne veux pas y réfléchir ou en parler à Alexis avant de prendre une décision?

La jeune femme secoua négativement la tête et se leva. Lorsqu'elle voulut quitter la salle de bain, Brigitte lui barra le chemin.

- Réfléchis plus d'une seconde, Ariane. Tu peux te faire avorter si tu veux. Personne ne peut t'en empêcher. Par contre, n'oublis jamais que c'est une décision qui te suivra toute ta vie. Que tu poursuives ta grossesse ou non, tu devras vivre avec ta décision.

Ariane bouscula Brigitte et se sauva dans sa chambre. Elle en ressortit habillée. Elle attrapa son manteau. Près de la porte d'entrée, elle mit ses bottes. En sortant, la jeune femme se heurta à son copain qu'elle plaqua contre le mur pour dévaler l'escalier. Alexis n'eût pas le temps de lui expliquer la raison de son retour.

Étonné, Alexis entra chez-lui et trouva Brigitte. Il l'invita à s'assoir et lui offrit un café.

- Elle est enceinte. Je me trompe? demanda t'il.
- Non. Tu as raison. Et elle le prend très mal. Elle a brisé le mirroir de la salle de bain. Toi, qu'est ce que tu en penses?
- Je n'ose pas y penser. Je crois que je vais attendre qu'elle prenne une décision avant de me faire une idée.
- Tu ne lui en parleras pas?
- Non. C'est elle qui le porte. Elle a dix-sept ans, un père en prison, une soeur en famille d'accueil et une mère absente. Je comprend qu'elle n'aie pas envie d'un bébé.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 3 Juin - 1:10

Chapitre treize

Courir à sa perte



Ariane courrait sans savoir où elle allait. Elle courrait pour arrêter de penser. La neige qui tombait l'empêchait de voir où elle allait. Elle ne vit pas la petite voiture blanche dont le conducteur perdait le contrôle. Sans avoir le temps de faire quoi que ce soit pour l'éviter, Ariane fût frappée de plein fouet. Elle roula quelque mètres pleus loin. La voiture s'immobilisa. Une demoiselle sortit du côté passager et s'approcha d'Ariane.

- Elle bouge! cria t'elle au conducteur.

Elle s'appocha d'Ariane et écarta ses cheveux de son visage. Le conducteur s'approcha. En voyant le visage d'Ariane, la demoiselle figea.

- Qu'est-ce qui ce passe? Tu la connais? lui demanda le jeune homme.
- Je suis allée à l'école avec elle. C'est la fille de Robert Veilleux. L'homme d'affaire qui vient d'être condamné à dix ans de prison. Appelle une ambulance.

Le jeune homme prit son portable et téléphona. La jeune femme essaya de savoir si Ariane était consciente.

- Ariane. Tu m'entend?

Ariane bougea légèrement les doigts, mais ne répondit pas. L'ambulance ne tarda pas à arriver. Se sentant affreusement coupable. la jeune demoiselle insista fortement pour monter dans l'ambulance avec Ariane.

*****


Pendant ce temps, Alexis attendait sa copine en discutant avec Brigitte. La sonnerie du téléphone se fit entendre. Alexis décrocha le combiné. Après avoir raccroché. il resta silencieux un long moment. C'est Brigitte qui brisa le silnce.

- Qu'est ce qui se passe?
- Tu as ta voiture? Je dois aller à l'hopital. Ariane y est, mais je n'en sais pas plus.
- Je t'amène.

*****


Alexis trouva rapidement la chambre à laquelle Ariane avait été amenée. Il s'inquiéta de la présence d'une étrangère au chevet de sa copine.

- Qui es-tu?
- Je m'appelle Karine. J'ai connu Ariane à la polyvalente. C'est mon copain qui l'a renvrsée avec la voiture. Je sais que ça n'excuse rien, mais avec la neige, il ne l'a pas vue assez vite pour l'éviter. Je vais te laisser seul avec elle et aller dire aux infirmières que tu es là. Le médecin voudra sûrement te parler.
- Merci.

Seul avec Ariane, Alexis laissa couler une larme. Il n'arrivait pas à s'enlever de la tête qu'Ariane s'était peut-être consciemment jettée devant la voiture. Elle venait de vivre un procès éprouvant et s'était retouvée enceinte sans l'avoir voulu. Peut-être en avait-elle eu assez. Alexis fût interrompu par l'entrée du médecin.

- Bonjour monsieur, dit le médecin. Je suis le Docteur Philippe Dagenais. Vous voulez bien me suivre? J'ai à vous parler.

Alexis se retourna pour jetter un coup d'oeil à Ariane.

- Elle n'est pas inconsciente, monsieur. Elle dort. J'ai dû lui injecter un sédatif, mais rassurez-vous, elle se réveillera bientôt.

Alexis suivit le médecin dans un petit bureau. Il s'instala sur un chaise et attendit que l'homme lui parle. Assis dans son fauteuil, le médecin s'éclaircit la voix.

- Je ne vous ai pas demandé votre nom, mais je présume que vous êtes Alexis. À son arrivée, vous êtes la seule personne qu'elle demandait.
- Dites-moi ce qu'elle a, Docteur.
- Des blessures mineures. Elle a un bras cassé, quelques équimauses et trois côtes brisées. Elle a eu de la chance. Seul son utérus a subi des dommages plus importants. Vous saviez qu'elle était enceinte?

Alexis fît un signe affirmatif.

- Je suis désolé, mais elle ne l'est plus. Vous n'avez surement pas envie d'entendre ça, mais il serait assez surprenant qu'elle arrive à concevoir de nouveau.
- Combien de temps la gardererez-vous ici?
- Je ne peux pas vous répondre maintenant. Il faut qu'elle voit le psychologue de l'hôpital avant que je la laisse partir.
- Elle ne lui dira rien. Elle est déjà suivie régulièrement par le Docteur Cynthia Desrochers. Ariane n'est pas bavarde. Croyez-moi, Docteur, même si vous la gardez ici durant des mois, vous n'obtiendrai pas qu'elle parle à votre collègue. Surtout si c'est un homme. Vous connaissez votre boulot, mais moi, je connais ma copine. Elle est très douée pour le silence.
- Le Docteur Desrochers ne travaille pas avec l'hôpital, monsieur. De plus, elle manque d'expérience. Ariane sera entre meilleures mains avec le Docteur Michel Sirois.

Sans prendre le temps de répondre, Alexis se leva. Il appelerait lui-même le Docteur Desrochers. Le Docteur Dagenais suivit Alexis jusqu'à la chambre d'Ariane. La porte était fermée.

- Vous ne pouvez pas entrer. Elle est en rencontre.
- C'est ce que nous verrons, Docteur, dit Alexis en mettant la main sur la porte.

En ouvrant la porte, Alexis eut une soudaine envie de frapper le psychologue. Ariane avait les poignets retenus au lit par des sangles de cuir. Elle ne disait rien et fixait le vide. Alexis marcha jusqu'au lit et défit la première sangle. Le visage endormi de sa copine fit comprendre à Alexis qu'elle avait été réveillée par le thérapeute. Le jeune homme se demanda comment, dans un tel état de somnolence, Ariane avait pu avoir une réaction assez agressive pour être attachée.

- Vous êtes quoi? demanda t'il au psychologue. Un thérapeute ou un torsionnaire?
- Il faut l'empêcher de se blesser, monsieur, répondit le Docteur Sirois. Regardez ses mains.

De sa main libre, Ariane essayait de défaire la seconde sangle de cuir. Son plâtre l'empêchait d'y arriver. Alexis passa de l'autre côté de lit. Il détacha le poignet d'Ariane. Ayant les deux bras libres, la jeune femme s'accrocha au cou de son copain.

- Ariane, tu as des côtes fracturées. Je vais te faire mal.

Voyant que sa copine refusait de le laisser, il la souleva doucement et s'instala dans le fauteuil près du lit. Puis, il s'adressa au psychologue.

- Faites semblant d'avoir quelque chose à faire ou d'autres patients à traumatiser, Docteur Sirois. Vous n'aurez plus la chance de l'approcher, je vous en donne ma parole.

Lorsque le psychologue eût quitté la pièce, Alexis s'adressa au médecin.

- Si vous oubliez son état psychologique, est-ce que je peux la sortir d'ici sans danger?

Le médecin regarda Ariane déjà endormie dans les bras d'Alexis.

- Ses blessures sont nombreuses, mais mineures. Je ne devrais pas faire ça étant donné son état psychologique, mais je vais signer son départ et vous donner rendez-vous dans une semaine aux cliniques externes. De toute façon, avec vous dans la chambre, personne ne pourrait l'approcher.
- C'est de la voir attachée que je n'ai pas supporté. Je sais qu'elle se blesse souvent, mais je sais aussi que lui faire peur n'aidera pas. Je ne suis pas médecin, mais je la connais bien. Je n'ai pas l'intention de la laisser revoir le Docteur Sirois. Le Docteur Desrochers n'a peut-être pas son expérience, mais Ariane lui fait confiance.
- Et elle vous fait confiance à vous, ajouta le médecin en observant le visage détendu d'Ariane. Si je voulais la garder, il faudrait que je vous garde aussi.

En attendant l'autorisation du médecin pour quitter l'hôpital, Alexis demanda à Brigitte d'aller lui chercher des vêtements. Ceux qu'elle portait à son départ étaient tachés de sang.

*****


De retour à la maison, Alexis portait toujours Ariane contre lui. Elle avait dû recevoir une trop forte dose de sédatifs. Depuis qu'elle s'était endormie dans ses bras à l'hôpital, elle avait à peine ouvert les yeux le temps de s'habiller. Doucement, il la déposa sur le divan et, comme promis au médecin, il téléphona au Docteur Desrochers. La psychologue accepta de voir Ariane dès le lendemain.

Lorsque la jeune femme se réveilla, elle tenta de se redresser, mais étouffa une plainte. Chacun de ses mouvements étaient affreusement douloureux. Alexis s'approcha et l'aida à s'assoir. Ariane jetta un oeil à son bras plâtré. Elle se souvenait que quelqu'un l'avait attachée à son lit, mais avait du mal à se rappeller le reste.

- Tu as le bras cassé, trois côtes fracturées et des bleus partout. Tu t'en tires assez bien.
- Mais je ne suis plus enceinte.
- Ton utérus a subi trop de dommages, Ariane.

Alexis jugea bien inutile de lui dire maintenant qu'elle n'arriverais plus à concevoir un enfant. Le médecin lui en parlerait lors de son rendez-vous. Lui, il n'arrivait pas encore à s'expliquer l'accident. Par contre, il n'osait pas demander à Ariane si elle s'était jettée devant la voiture. Il n'avait pas envie de savoir.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 3 Juin - 1:11

Chapitre quatorze

Creux de vague



Depuis qu'elle était sortie du bureau du Docteur Dagenais, Ariane en voulait cruellement à Alexis. Elle aurait voulu courir jusqu'à chez-elle, mais ses côtes douloureuses l'en empêchaient. À son arrivée, elle trouva son copain à faire le ménage de l'appartement. Sans même le regarder, elle retira ses bottes et son manteau.

- Tu aurais pu m'en parler, lui dit-elle d'une voix étouffée.
- Je ne savais pas comment.

Alexis laissa ses activités et entraîna Ariane au salon.

- Comment tu voulais que je t'annonce ça? Un matin entre deux gorgées de café?
- Je n'en sais rien, admit Ariane.
- La vérité, Ariane, c'est que je ne veux pas y penser. Je me suis toujours vu avec une grosse famille. Je voulais une femme, quatre enfants, une maison, un chien et une picine. C'est encore ce que je veux. Je n'ai pas changé d'avis.
- C'est bien. J'apprend que nos jours sont comptés. Il ne me reste qu'à espérer que tu n'aies pas envie d'une famille trop rapidement.

Ariane se leva et disparut dans la chambre en calquant la porte. Alexis lui laissa quelques minutes pour se calmer et alla la rejoindre. Elle était assise sur le lit. Elle fixait le mur, les yeux remplis de larmes. Il prit place derrière elle et referma ses bras autour de sa taille.

- Je ne me suis pas jettée devant la voiture. C'était vraiment un accident. J'avais l'intention de me faire avorter, c'est vrai. Je ne veux pas d'un bébé maintenant. Je commence à peine à vivre. Mais dans quelques années, j'aurais bien aimé avoir des enfants. Maintenant, je n'ai plus le choix. Je sais que je n'en aurai pas.
- On ne vit pas sur la même planète toi et moi?

Ariane se retourna et le dévisagea.

- De quoi tu parles?
- Ariane, il y a des milliers d'enfants déjà au monde qui recherchent des parents. J'ai dit que je voulais des enfants. Je n'ai jamais dit que je voulais absolument qu'ils viennnent de moi. Je n'accepterais pas que tu les fabriquent avec le voisin, mais si on ne peut pas les faire nous même, on les adoptera.

Ariane avait souvent vu des documentaires sur l'adoption, mais n'y avait jamais pensé pour elle-même. Elle avait troujours imaginé avoir des enfants naturellement. Elle avait le même rêve que bien d'autres. Elle voulait un compagnon, des enfants, une petite maison avec un jardin fleuri. Elle n'était pas certaine de pouvoir accepter que ses enfants n'auraient aucun de ses traits. Elle avait encore bien du temps pour y penser. Mais elle devrait remettre ses réflexions à plus tard. Elle était attendue au café.

*****


Devant le café. Alexis était inquiet.

- Tu es certaine que ce n'est pas trop tôt pour reprendre?

Ariane se retourna vers son copain.

- Je sais que c'est trop tôt. Juste respirer, ça me fait mal et je ne sais pas comment je vais pouvoir servir les clients avec mon plâtre, mais si je n'y vais pas, je vais perdre mon emploi. Je ne fais que quatre heures. Je crois que je vais y survivre.
- Si ça ne va pas, appelle-moi. Je viendrai te chercher.

Ariane ne répondit pas. Elle passa la porte vitrée. Son copain lui souffla un baiser qu'elle fit mine d'attrapper et de glisser dans sa poche. À l'intérieur, elle retrouva Brigitte en compagnie d'une nouvelle employée. Ariane attaira Brigitte dans un coin.

- Qui est-ce? demanda t'elle un peu inquiète.
- Elle s'appelle Judith. Elle a commencé il y a deux semaines.

Ariane resta muette. Devinant facilement à quoi pensait sa jeune collègue, Brigitte ajouta.

- Elle travaille à temps plein seulement pour quelques semaines. Tu n'as pas été remplacée. Je ne peux pas tout faire seule.
- Je vais peut-être demander à rester à temps partiel. Je ne travaille pas depuis plus de deux semaines et ça ne fait pas vraiment de différence.

Sans attendre, Ariane se retoura et alla voir son patron. En fait, Ariane n'avait pas l'intention de moins travailler. Elle avait l'intention d'arrêter dans quelques mois. Elle voulait retourner à l'école. Elle n'en avait pas encore parlé à Alexis. Le lendemain, Audrey serait avec elle pour le temps des fêtes. Ariane souhaitait éviter toutes discussions orageuses.

Lorsqu'elle quitta le café, Ariane était épuisée. Elle aurait voulu dormir, mais avait rendez-vous avec le Docteur Desrochers. Alexis l'attendait dehors. Il l'accompagna jusqu'à la clinique.

*****


Ariane était assise, mais ne parlait pas. Elle avait tellement de choses à dire en même temps qu'elle restait muette. Elle attendait comme d'habitude, mais le Docteur Desrochers aussi restait muette. Ariane se leva. Elle n'avait pas envie d'être là.

- Attend un peu, Ariane. Tu es venue pour que je te regarde? Tu n'as rien à dire?

Ariane reprit place dans son fauteuil.

- Je suis fatiguée.
- Ça je le vois bien, mais je ne suis pas certaine que le sommeil arrange les choses.

Encore une fois, la psychologue avait raison. Dans ces moments-là, Ariane la détestait.

- Je suis à bout de souffle. J'ai l'impression d'avoir trop vécu trop vite. Trois ans d'enfer, une fugue, un procès... Je trouvais ça énorme, mais ce n'est pas tout. En une seule journée, j'ai appris que j'étais enceinte et je me suis fait frapper par une voiture. Non seulement, je ne suis plus enceinte, mais ça m'a rendue stérile. Sur le coup, je ne m'en rendais pas compte, mais maintenant que j'ai le temps d'y penser, ce n'est plus pareil.
- Il y a quelque chose en particulier dont tu as envie de parler?

Ariane n'avait pas envie de parler. Elle répondit quand même.

- Ça me rend folle de savoir que je suis stérile à mon âge.
- Tu es complètement stérile, Ariane?
- Le médecin m'a dit qu'il serait assez surprenant que je puisse encore être enceinte. Je préfère me dire que je n'aurai jamais d'enfants biologiques. C'est plus simple. Ma seule consolation dans cette histoire, c'est que mes enfants n'auront pas les gênes de mon père.
- Qu'est-ce que ça changerait?

Ariane ne savait pas trop comment expliquer ce qu'elle voulait dire. Dans sa tête, c'était clair, mais elle cherchait des mots pour le dire.

- J'ai l'impression d'avoir une part de responsabilité dans les actes de mon père parce qu'il est mon père. J'ai une partie de lui en moi. Je ne peux rien y faire. C'est génétique. Sans lui, je n'existerais pas. J'ai l'impression de lui devoir quelque chose. C'est peut-être pour ça que je n'ai rien dit durant des années.
- Et si tes enfants n'ont pas sa génétique, ils ne lui devront rien. C'est ça?
- Un peu. Ils ne lui ressembleraient pas.
- Les parents choisissent d'avoir des enfants, Ariane. Pas le contraire. Tu n'est pas responsable des agissements de ton père.
- Je sais, mais une partie de moi ne le comprend pas.
- Ça viendra avec le temps. Que vas-tu faire en sortant d'ici?

Ariane ne le savait pas. Alexis la laissait à peine bouger depuis l'accident.

- Probablement rien. Mais ce que j'aimerais, c'est aller acheter un sapin et des décorations. Ma soeur arrive demain soir. Je voudrais un vrai Noël. Décorer le sapin avec ma soeur, ça serait comme de me dire qu'il me reste encore quelque chose d'une vie normale. On le faisait toujours ensemble. En fait, je le faisais et Audrey rouspétait sur l'emplacement des boules. J'adorais le temps des fêtes. Ma vie ressemblait à celles des autres filles durant cette période de l'année.
- Pourquoi tu ne le ferais pas?
- Je ne pourrais pas décorer le sapin avec mes côtes brisées. Je n'arrive pas à lever les bras.

La psychologue eût un léger sourire.

- Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle, s'offusqua Ariane.
- Ta soeur pourrais faire le sapin pendant que tu rouspètes sur l'emplacement des décorations. Le jeudi, les magasins ferment tard. Tu as le temps d'y aller. Tu n'as qu'à dire à Alexis que ça fait partie de ta thérapie.
- Je ne vais pas lui mentir, répondit la jeune femme.
- Ce n'est pas ce que je te demande. Je te demande de décorer un sapin avec ta soeur. Au retour du temps des fêtes, tu me racontra comment tu as vécu ce moment. Tu peux partir. Je te revois après les fêtes.
- D'accord.

Ariane retrouva Alexis.

- Viens, lui dit-elle. Il faut aller acheter un sapin avant la fermeture des magasins.
- Ah bon. Et qui va le porter jusqu'à la maison ton sapin?

Ariane lui décrocha un sourire et l'entraîna dehors.

- Tu ne peux pas refuser. C'est thérapeutique.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 3 Juin - 1:17

Chapitre quinze

La lettre



Assise sur le divan, Ariane suivait avec attention l'évolution du sapin que décorait sa jeune soeur.

- Non. Mets cette boule ailleurs. Il y en a déjà une bleue juste en bas.
- Tu veux venir le faire toi-même ton sapin? lui demanda Audrey
- Je ne peux pas. Mes côtes font mal.

Audrey se retourna vers sa soeur.

- Alors tais-toi et laisse-moi décorer en paix.
- Non. Rouspéter pendant que tu travailles fait partie de ma thérapie.

Ariane s'amusait du manque de patience de sa jeune soeur. Elle la laissa placer les décorations. Audrey n'avait pas sa patience. Elle risquait de se fâcher.

Alexis, absent depuis le matin passa la porte. Audrey, qui venait de placer la dernière boule dans le sapin, prit ses bottes et son manteau et sortit dehors. Elle n'aimait pas être présente lorsqu'Alexis rentrait. Les démonstrations d'affection entre sa soeur et son copain la mettaient mal à l'aise. À part à la télévision. elle avait rarement vu un couple s'embrasser. Si Ariane avait eu un appartement plus grand, elle aurait disparu dans une chambre et aurait écouté de la musique le temps de laisser sa soeur et Alexis se raconter une journée sans intérêt et échanger de la salive. La jeune fille n'alla pas bien loin. Il faisait froid. Elle retourna chez sa soeur. Elle avait quelque chose à lui donner. Elle voulait le faire au plus vite.

- Tu disparaîs souvent, Audrey, lui dit Alexis lorsqu'elle entra.

Audrey ne répondit pas. Elle retira ses bottes et son manteau et s'approcha de sa soeur, une enveloppe à la main.

- Maman me l'a remise pour toi la dernière fois qu'elle est venue me voir. Elle a dit que c'était important que tu la lises.

Ariane se leva, prit l'enveloppe et se dirigea vers sa chambre. Elle referma la porte derrière elle.

- Qu'est-ce que c'est? demanda Alexis.
- Je ne sais pas, lui dit Audrey. Je n'ouvre pas les enveloppes qui ne m'appartiennent pas.

Pour ne pas avoir à parler davantage, Audrey alluma la télévision.

*****


Assise sur son lit, Ariane ouvrit l'enveloppe. Elle contenait une feuille de papier un peu jaunie. C'était une lettre de sa mère.

Juillet 2003
Ma belle Ariane,
Si tu peux lire ces lignes, c'est que tu as quitté la maison. J'espère que tu es heureuse. Moi, je ne l'ai jamais été. Pas depuis mon mariage avec Robert.
Aujourd'hui, c'est ton anniversaire. Je suis seule à la maison. Robert travaille et toi, tu es au parc avec Audrey. Je profite de ce rare moment de solitude pour t'écrire mes aveux.
Il y a longtemps que je veux te dire la vérité, mais Robert refuse. Il dit que ça ne te regarde pas. Je crois que lui-même, a du mal à l'accepter. Il n'est pas ton père, Ariane. Tu es venue au monde un peu moins d'un an avant notre mariage. Je croyais faire une bonne chose en l'épousant, mais il te déteste. Si je l'avais su avant, je t'aurais élevée seule.
Au fond de l'enveloppe, tu trouveras une photo. Robert n'a pas réussi à la brûler. C'est ton père. Tu lui ressemble beaucoup. Ne le cherche pas. Ce serait inutile. Il est décédé quelques mois avant ta naissance. Par contre, sur un petit carton, tu as l'adresse de sa mère. Elle habite toujours au même endroit. Elle sait que tu existes. Je t'amenais souvent chez-elle avant mon mariage.
Ne m'en veux pas trop,
Diane



Ariane regarda dans l'enveloppe. Il y avait bien une petite photo et un carton. Elle prit la photo. C'était un jeune homme aussi blond qu'elle. Le plus frappant, c'était les yeux. Ariane avait les iris d'un vert très pâle. Elle venait d'en trouver la cause. Le jeune homme sur la photo avait les mêmes. Ariane rangea le petit carton dans un tirroir. Elle n'avait pas envie de savoir maintenant. Elle voulait dabord en discuter avec Alexis. Ariane quitta sa chambre, la lettre dans une main.Elle fit signe à Alexis de la rejoindre. Elle ferma la porte. Elle ne voulait pas qu'Audrey entende.

- C'était quoi, cette enveloppe?
- Lis, lui dit-elle en lui remettant la lettre et la photo.

Alexis recula contre le mur en voyant la photo. Il lut la lettre et fixa Ariane.

- J'ai déjà vu ce visage. Tu as les coordonnées de cette femme?

Ariane prit le carton dans le tirroir et le tendit à son copain. Alexis arrêta de respirer.

- Si tu me dis que cette femme est ta grand-mère, je te jure que je vais vomir pendant les dix prochaines années.

Alexis restait muet.

- Dis quelque chose.
- Ta grand-mère s'appelle Margaret. Ton père s'appellait Brian. Il est décédé d'un accident de voiture. Il s'était endormi au volant. Jusqu'à l'âge d'environ un an, ta grand-mère te gardait chez-elle trois jours par semaines. Tu as probablement changé de prénom lorsque Robert t'a adoptée.
- Mais qu'est-ce que tu racontes? Comment tu sais tout ça?
- Margaret était ma gardienne. De ma naissance à mon entrée à l'école, je passais mes journées chez elle.
- Un minute! J'ai changé de prénom? Je ne comprend rien!

Alexis ouvrit le garde-robe. Il prit une boite sur la tablette du haut et la déposa sur le lit avant d'y prendre place et d'attirer Ariane près de lui. Il ouvrit la boite.

- Tu cherches quoi? lui demanda Ariane un peu inquiète.
- Une photo qui devrait t'interresser.

Au fond de la boite, Alexis trouva ce qu'il cherchait. Il la tendit à Ariane. Sur la photo, il y avait un petit garçon assis dans un gros fauteuil qui tenait devant lui une petite fille grassouillette et souriante.

- C'est moi, dit Ariane un peu ébranlée. Je n'ai aucun doute là dessus.
- Mais la fillette sur la photo, elle s'appelle Mary-Ann.
- Tu en es sûr? Tu n'étais pas très âgé à l'époque.
- J'avais quatre ans. Mary-Ann Green. Je m'en souviens très bien. J'avais déjà demandé ta main à Diana.

Ariane en avait le souffle coupé. Sa mère s'appellait effectivement Diana Green. Peu de gens le savaient. Le jour de son mariage, elle était devenue Diane Veilleux. Plus personne ne l'avait appelée Diana. Si Diana était devenue Diane, Mary-Ann avait très bien pu devenir Ariane.

- Alexis, je veux voir cette femme, Margaret. Et pas seulement bientôt. Maintenant.
- Qu'est-ce qu'on fait d'Audrey?
- J'appelle Brigitte. Elle ne travaille pas aujourd'hui.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyJeu 8 Juin - 18:12

Chapitre seize

Rencontre avec Margaret



Alexis venait de frapper à la porte d'une petite maison de pierres. Ariane était nerveuse. Malgré le froid qui y règnait, elle serait bien restée dehors. Elle allait bientôt se retrouver en face d'une femme qui en savait plus sur elle qu'elle-même. La porte s'ouvrit sur une femme d'une soixantaine d'années.

- Bonsoir Maggie, dit gentiment Alexis. Je vous amène quelqu'un.

Ariane était restée derrière son copain. Alexis la fît passer devant lui. Ariane était gênée. Son coeur battait si fort dans sa poitrine qu'elle en était étourdie. Margaret observait son visage avec attention.

- Mary-Ann!
- C'est Ariane, maintenant, madame, dit la jeune femme un peu mal à l'aise.
- Ne restez pas dehors par ce froid. Entrez.

Alexis entraina Ariane à l'intérieur et referma la porte. La jeune femme ne reconnaissait pas les lieux, mais l'odeur lui semblait familière. Alexis, lui, n'avait pas besoin de faire appel à sa mémoire. Il savait.

- Maggie, vous avez fait des biscuits. Vous ne pouvez pas me le cacher.

Margaret éclata de rire.

- Petit glouton!

Après avoir retiré ses bottes et son manteau, Alexis aida Ariane à faire de même. Avec son bras encore plâtré, elle avait du mal à le faire elle même. Ariane grimaça légèrement. Ses côtes la faisaient souffrir.

- Tu es blessée, Mary-Ann?
- Rien de bien grave. Appellez-moi Ariane, s'il vous plaît. Je ne me souviens pas avoir eu un autre prénom que celui-là. Ça me trouble un peu.
- Excuse-moi. Je revois encore ma petite-fille qui a fait ses premiers pas dans cette maison. Tu avais treize mois.

Margaret invita le couple au salon. Ariane ne se sentait pas très bien. Elle avait l'impression de reconnaître certains éléments du décor. Pourtant, elle ne se souvenait pas de sa grand-mère.

- Dis-moi, Alexis. Comment as-tu retrouvé cette jeune fille? demanda Margaret en déposant un plateau de biscuits devant le jeune homme.
- Par hasard, répondit-il. J'ai su qui elle était il y a à peine deux heures.
- Je l'ignorais aussi, enchaina, Ariane. Pourtant, nous vivons ensemble depuis plusieurs mois.
- Et tu ne l'a pas reconnue, Alexis? demanda Margaret.
- Maggie, pensez-y un peu. J'ai connu Mary-Ann Green lorsque vous étiez ma gardienne et une quinzaine d'anées plus tard, j'ai rencontré Ariane Veilleux. Je pouvais difficilement faire le lien entre les deux.
- Veilleux, tu dis? Tu ne vas pas me dire que le Robert de Diana est ce monstre dont j'ai entendu parler au journal télévisé?

Alexis fit un petit signe de tête affirmatif. Il s'attendait à ce que Margaret ait une réaction assez intense, mais rien ne se passa. La dame resta calme.

- Tu n'as pas eu une très belle vie, Mary... Euh, désolée, Ariane.
- C'est mieux, maintenant, répondit la jeune femme en prenant la main d'Alexis. Racontez-moi, s'il vous plaît. Je ne me souviens de rien. J'étais toute petite et ma mère n'a jamais été très bavarde. Je voudrais savoir ce qui s'est passé dans ma première année de vie.

Margaret s'éclairci la voix. Ariane tremblait. Même si elle souhaitait savoir la vérité, elle était effrayée. Sentant son malaise, Alexis glissa ses doigts dans les siens. Ariane s'y accrocha.

- Tu es venue au monde exactement trois mois après la mort de mon Brian. J'étais là lorsque tu es née. C'est moi qui a choisi ton prénom, ton premier prénom. Tes premières semaines de vie, tu les a passées avec moi. Ta mère avait trop de soucis en tête. Peut-être aussi trop de chagrin. Tu avais six semaines lorsqu'elle est venue te reprendre. Vous habitiez près d'ici. Je te voyais très souvent.

Alexis se souvenait parfaitement du bébé dont Margaret prenait soin. Il se souvenait de la petite maison de pierres où sa gardienne et lui, reconduisait la petite fille le soir venu.

- La petite maison existe encore? demanda t'il.
- À deux rues d'ici. C'est une boutique d'artisanat, maintenant.

Voyant qu'Ariane était assez impatiente d'entendre la suite, Margaret continua son récit.

- Ta mère travaillait à temps partiel. Je prenais soin de toi durant ce temps. Ce n'était pas difficile. Tu était une petite fille si douce et gentille. Puis, ta mère a rencontré Robert. J'avais l'habitude de te parler en anglais. Il m'a demandé de ne plus le faire. Il souhaitait que tu parles sa langue. Pas celle de ton père. J'imagine que c'est pour cette raison qu'il t'a appellée Ariane. C'est beaucoup plus français. Après deux mois à le fréquenter, ta mère m'a annoncé son mariage. Elle m'a demandé de te garder. Tu devais rester avec moi. Robert préfèrait ne pas t'élever. J'en était triste et ravie à la fois. Une petite fille a besoin de sa mère, mais en même temps, j'étais si heureuse de garder près de moi la fille de mon unique fils.

La femme essuya une larme sur sa joue. Ariane ne la pressa pas. Elle aussi avait les larmes aux yeux. Alexis l'attira un peu plus près de lui. Margaret repris son histoire.

- Tu avais onze mois. Ta mère ne se montra pas à ton premier anniversaire. J'ai cru qu'elle t'avait définitivement abandonnée. Le temps passa doucement. Tu ne semblait pas malheureuse. Puis, un matin, Diana, devenue Diane t'a réclamée. Sans donner d'explications, elle t'a reprise avec elle. Je ne t'avais jamais vu pleurer autant. Tu avais quatorze mois. Après, je ne t'ai jamais revue.

Ariane pleurait. Sans savoir pourquoi puisqu'elle n'en avait pas souvenirs, elle était incapable de s'arrêter. Près d'elle, Alexis restait muet. Il savait que s'il parlait, Ariane ne dirait rien. Margaret aussi garda le silence. Elle observait les traits fins d'Ariane, si semblables à ceux de son fils bien-aimé. Pour se soustraire au regard de sa grand-mère, la jeune femme cacha son visage dans le cou de son copain. Elle mit plusieurs minutes à calmer ses sanglots.

- Ma vie aurait été bien différente si j'étais restée ici. Je n'aurais pas eu de soeur, ou plutôt, je ne l'aurais pas connue, mais j'aurais sans doûte eu une vie plus calme.

Margaret se leva et disparût derrière une porte pour revenir quelques minutes plus tard. Elle tenait une petite boîte. Elle la déposa sur les genoux d'Ariane et retourna s'assoir.

- Ce sont des souvenirs que j'ai gardé de toi. J'aimerais que tu les prennes. Ils t'appartiennent plus qu'à moi.

Ariane ouvrit la boite. Un petit toutou capta son attention. Elle le sortit pour le regarder. Un sourire se dessina sur ses levres. Alexis se souvenait très bien de cette peluche, mais il laissa Ariane l'observer en silence. Il revoyait le bébé incapable de s'endormir sans sa peluche et qui la plaçait devant elle pour jouer.

- C'est Bunny, dit la jeune femme, plus pour elle même que pour être entendue. Ma mère m'a toujours dit que je l'avais perdu au parc. C'est la seule chose dont je me rappelle.
- Je l'a retrouvé après ton départ avec ta mère et Robert. Je n'ai jamais voulu le jetter.

Ariane remit le petit lapin dans la boite. Elle ne savait pas si elle devait raconter à sa grand-mère comment s'était passé sa vie sous la tutelle de Robert Veilleux. Finalement, c'est Margaret qui trancha la question.

- C'est à ton tour, Ariane. Tu as une petite soeur? Comment s'appelle t'elle?
- Elle s'appelle Audrey. Elle a douze ans. Robert voulait une grosse famille. Ma mère et lui aurait bien voulu que cette enfant arrive plus tôt et qu'elle soit suivie de deux ou trois autres. Je n'ai jamais su pourquoi, mais Audrey a été un vrai miracle à ce qu'on m'a dit.
- Est-ce qu'il te traitait déjà mal à cette époque?

Ariane prit le temps de réfléchir. Près d'elle, Alexis se demandait si elle allait répondre. Même lui ne connaissait pas la réponse. Ariane lui avait parlé de son adolescence difficile, mais jamais de son enfance.

- Je n'ai que très peu de souvenirs de mes premières années. Robert n'était pas méchant. C'est vraiment à l'adolescence que tout a commencé. Avant. il était plus distant avec moi qu'avec Audrey, mais j'ai toujours cru que c'était dû au fait qu'Audrey est plus facile d'approche que moi.

Ariane n'avait pas l'intention d'en dire plus. De regard, elle fit comprendre à Alexis qu'elle souhaitait partir. Il se faisait tard et Audrey l'attendait. Le jeune homme se leva et alla serrer Margaret dans ses bras en lui prommettant de revenir un autre jour. Il quitta la maison, Ariane à son bras.

Un fois dehors, Ariane serra Alexis dans ses bras.

- Je sais maintenant pourquoi j'ai peur de m'attacher.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptyJeu 8 Juin - 18:13

Chapitre dix-sept

La lucidité d'une adolescente



C'était le matin de Noël. Audrey s'était réveillée avant sa soeur et Alexis. Sous le sapin, il y avait une dizaine de paquets. La jeune fille défit ses tresses et alla prendre une douche. C'est un point qu'elle avait en commun avec sa soeur. La journée ne pouvait pas commencer sans une douche froise ou bouillante. Pas de milieu. La glace ou le feu. Ce matin là, pour Audrey, c'était la glace.

En sortant de la salle de bain, Audrey vit Alexis assis au comptoir de la cuisine avec son café. La jeune fille s'en versa une tasse et alla s'asoir avec lui. Alexis la trouvait jeune pour cette habitude, mais il ne disait rien. Ariane lui avait expliqué que che-elle, le café du matin était une habitude qu'on prenait très jeune.

- Bon matin, Audrey, dit Alexis. Tu tremble?
- Douche froide.
- Tu es bien comme ta soeur. Mais elle, préfère se brûler ces temps-ci.
- Tu aimes ma soeur? je veu dire, pour vrai. Pas comme ces gars qui veulent être avec elle juste parce qu'elle est belle.
- Tu les as les questions ce matin, toi!
- Répond ou je prendrai ton silence pour un non.

Saisi par le sans-gêne de l'adolescente, Alexis prit une longue gorgée de café.

- Oui, je l'aime. Et ce n'est pas parce qu'elle est belle. Je ne mentirai pas. Son physique ne me déplait pas du tout. Mais elle est avant tout une personne extraodinaire. je l'aimerais même si elle était verte.
- C'est vrai tout ce qu'on raconte à la polyvalente sur elle?
- Qu'est-ce qu'on raconte, Audrey, demanda Ariane, qui, sans bruit, avait quitté la chambre et s'était adossé au mur.

Mal à l'aise, Adrey n'osa pas répondre. Elle fixait sa tasse de café. Ariane s'approcha d'elle et fit signe à son copain de les laisser. Alexis, café à la main, disparût dans la chambre. Ariane prit place près de sa soeur.

- Qu'est-ce qui se raconte, Audrey?
- Je n'ai pas envie d'en parler.
- Tu allais pourtant le dire à Alexis.
- Il n'est pas ma soeur.

Audrey prit une gorgée de café et sembla trouver un intérêt soudain au fond de sa tasse. Elle n'osait pas regarder sa soeur.

- Je vais te le dire, moi, ce qui se dit, Audrey. Les plus vieux racontent que je suis une pute.
- Ce sont des imbéciles.
- Non. Ils ont raison.

La jeune fille leva les yeux de sa tasse. Elle fixait sa soeur d'un air menaçant.

- Si toi tu le dis, c'est comme leur donner le droit de le dire! Et j'en ai assez d'entendre ça! Ici, personne ne connait notre famille. Tu es à peu près tranquille. Mais moi, je vis avec des gens qui nous ont connues enfants. Ma famille d'accueil, ils habitent la rue derrière la maison. Leur fille, c'est Catherine. Celle avec qui tu chassais les grenouilles quand tu avais cinq ans. Si je n'avais pas douze ans, je partirais aussi. Du moins, c'est ce que je croyais jusqu'à aujourd'hui. Mais là, je sais que ça ne changerais rien. Tant que toi, tu te battais pour pas être ce qu'ils disent que tu es, ça valait la peine. Mais tu te traite de pute toi-même. Tu es partie de la maison, mais qu'est-ce que ça change s'ils t'ont complètement tuée en dedans? Il reste un bout de ma soeur quelque part?

À bout de mot, l'adolescente se leva et alla s'assoir dans le salon pour y finir son café devant la télévision. Encore une fois, elle avait peut-être été trop directe avec sa soeur, mais elle ne s'en voulait pas. Selon elle. ce n'était pas de rendre service à quelqu'un de toujours mettre des gants blancs.

Seule du comptoir, Ariane ne savait pas quoi dire à sa soeur. Quelque chose en elle lui sidait qu'Audrey, malgré son jeune âge, avait peut-être raison. Cette adolescente avait toujours eu une lucidité hors du commun. Elle n'était pas douce comme elle et sa mère. Elle était franche, directe. Elle était de celles qui croient que tout est une question de volonté. C'est ce qui lui permettait d'avancer. Ariane se leva et se servi une tasse de café. Elle n'avait pas envie de répondre aux paroles de sa soeur. Elle alla rejoindre Alexis dans la chambre.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 10 Juin - 15:07

Chapitre dix-huit

Une famille pour Noël



La discussion du matin était déjà derrière. Ariane et Audrey se préparaient pour un souper dont elles n'avaient pas vraiment envie, mais qui faisait plaisir à Alexis.

- Cache ça ce soir, dit Ariane à sa soeur en montrant son nombril percé. Je ne sais pas qui on attend, mais on ne sera pas seule. Je ne suis pas certaine qu'une jeune fille de douze ans avec le nombril à l'air et percé, ça fasse bonne impression.
- T'en fais pas. Je vais mettre une robe et on ne verra rien. J'ai pas le nombril percé pour choquer. J'en avais envie c'est tout.

*****


Dans la cuisine, Alexis préparait la table. Les deux filles allaient passer un beau Noël et ça serait en partie grâce à lui. Depuis un mois, toutes les absences d'Ariane lui servaient à organiser ce souper. Heureusement, Ariane n'avait rien vu.

Alors qu'il replaçait le centre de table, on frappa discrètement à la porte. Par chance, les deux filles, enfermées dans la salle de bain, n'avaient rien entendu.

- Ne faites pas de bruit, dit Alexis à Brigitte et Margaret qui venaient d'arriver. Je n'ai pas dit aux filles que vous veniez. Passez au salon et mettez les paquets sous le sapin. Je vais faire sortir ces demoiselles de la salle de bain.
- Tu les a enfermées? s'indigna Brigitte
- Mais non, répndit Alexis. Des filles, on a pas besoin de les enfermer pour qu'elles restent dans la salle bain.

Sans aucune discrètion, Alexis frappa à a porte de la salle de bain.

- On sort de là, les filles! Vous êtes assez propres, assez habillées et assez maquillées. Ça fait des heures que vous êtes là dedans.

Aucune réponse

- Les filles, je vais défoncer la porte!

Sur ces douces parole, la porte s'ouvrit pour laisser apparaitre les deux filles. Alexis les prit par la taille pour les mener au salon.

- Regardez ça, les femmes, dit-il à Brigitte et Margaret. J'ai deux jolies demoiselles avec lesquelles passer la soirée.

Puis, pour il se tourna vers Audrey.

- Je te présente Margaret. Elle est la grand-mère de ta soeur et mon ancienne gardienne.

Audrey baissa les yeux. Elle savait depuis peu qu'Ariane n'avait pas le même père qu'elle, mais elle refusait d'y penser. Savoir que sa soeur n'avait pas les mêmes racines qu'elle la peinait un peu. Elle ne pouvait pas s'empêcher de penser qu'elle perdait quelque chose. Un peu de sa soeur peut-être. Elle resta silencieuse. Ariane, elle, alla gentiment embrasser les deux femmes. Elle était contente de les avoir avec elle pour Noël. C'est Brigitte qui brisa le silence.

- Alors, les enfants, on les déballe ces trucs? Je me souviens qu'à l'âge d'Audrey, je n'avait pas la patience d'attendre toute la journée pour ouvrir les paquets. Je faisais ça directement le matin de Noël.
- Je suis patiente, répondit Audrey. Et je ne croyais pas fêter Noël cette année. Alors pour moi, ça ne fait pas de différence.

Rapidement, le plancher se retrouva couvert de papier déchiré et la pièce, remplie de rires. Ariane semblait heureuse. Elle bavardait avec Margaret. Pendant un istant, Alexis eu l'impression que tout le passé était derrière eux. Mais il savait bien que ce n'était pas le cas. Autant profiter du moment calme pendant que ça passait.

Après un souper délicieux concocté par Alexis qui jurait ne pas savoir faire la cuisine, Margaret fit un offre à la jeune Audrey. Ariane et Alexis en avait déjà été informés. Pour qu'elle soit plus près de sa soeur et plus éloignée des racontards, Margaret offrait à Audrey de la prendre chez-elle jusqu'à la majorité d'Ariane ou tant qu'elle le désirerait.

- Rien ne te force à accepter, conclut Margaret. Je sais que ça te ferait quitter ton école et tes amis. Prend le temps d'y penser.
- Je ne veux pas y penser, madame, répondit Audrey. Je préfèrerais ça que d'habiter derrière la maison de ma mère chez des gens qui me prennent en pitié. Mais je ne veux pas partir d'ici avant la fin des vacances.

Tout le monde resta surpris par la réponse rapide de l'adolescente. Elle n'avait même pas voulu en parler à son travailleur social. Elle voulait faire un peu comme sa soeur et partir pour mieux recommencer. ça serait plus faciel pour elle si elle pouvait voir Ariane plus souvent que lors des longs congés scolaires.

*****


Lorsque tout le monde fût parti et Audrey endormie dans le salon, Ariane se laisa tomber sur son lit.

- Tu crois qu'elle sera bien, ma soeur, chez Maggie?
- Tu en doutes?
- Pas vraiment. C'est que je n'ai pas de souvenirs du temps que j'ai passé chez-elle. J'étais trop jeune.
- Fais confiance à ta soeur. Elle n'a pas la langue dans sa poche. Si elle n'est pas heureuse, tu le sauras bien assez vite. Et puis, ce n'est que temporaire. On essayera de la prendre avec nous bientôt.

Aleis passa son bras autour de la taille d'Ariane et l'attira contre lui. Elle dormait déjà. Et pour la première fois depuis longtemps, tous ses muscles étaient détendus.
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 10 Juin - 15:44

Conclusion



Audrey avait choisi de rester chez Margaret même si sa soeur avait maintenant l'âge de la prendre avec elle. Elle voyait sa soeur régulièrement, mais habiter avec un couple la gênait un peu.

Ariane n'ayant jamais terminé la polyvalente, elle retourna à l'école. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle voulait faire de sa vie, mais certainement pas travailler au café jusqu'à sa retraite. Elle y resta à temps partiel. Plus pour rigoler avec Brigitte que pour l'argent. Elle se grattait encore, masi acceptait qu'Alexis l'arrête. Elle voyait encore souvent sa psychologue, mais était plus bavarde. Tranquillement, elle reprenait confiance. Elle avait eu des nouvelles de sa mère, mais jamais elle ne la reverrait. Elle s"était fait une autre famille. Et celle-là, elle l'avait choisie.

Au boulot, Alexis avait eu une promotion qui lui permettait des horraires plus flexibles. Il passait plus de temps à la maison avec Ariane. Il n'avait pas abandonnée l'idée d'avoir un jour une grande maison remplie d'enfants, mais il savait que lorsqu'on sort d'une période aussi mouvementée, les rêves peuvent attendre quelques années.
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Maybel
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MessageSujet: Re: Un coeur dans la tourmente   Un coeur dans la tourmente EmptySam 10 Juin - 15:48

J'ai terminé ce roman. Il n'y aura pas de suite à l'histoire d'Ariane et Alexis. C'était une histoire courte.

J'écrirai encore, c'est certain, mais peut-être pas ici. Je n'ai pas perdu ma plume. J'adore encore écrire.

Pour ceux qui se sont rendus au bout de ce roman, merci. Sans lecteurs, on n'écrit pas. Cette histoire était un cadeau. Mais je ne sais pas s'il était pour moi ou pour vous...
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